Publié le 25 novembre 2019 à 15h48 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 13h26
Marseille a accueilli ce dimanche 24 novembre, au palais du Pharo, les 4e Rencontres maçonniques euro-méditerranéennes avec, pour objet: «Comment faire pour que la Méditerranée redevienne la Mare Nostrum?». En présence de Jean-Philippe Hubsch, le Grand Maître du Grand Orient de France, qui vient d’être réélu à cette fonction en août, à l’unanimité, pour un deuxième et dernier mandat d’un an. Dans ce cadre, il a participé, la veille, à une rencontre avec les maçons des 130 loges de la région Sud, 4 500 membres répartis dans les départements 13, 04, 05, 84, les deux départements Corse mais aussi la Sardaigne et la Sicile. «Nous comptons 1 360 loges au Grand Orient soit 54 000 frères et sœurs et nous connaissons une progression légère et régulière de nos membres. Nous sommes la première obédience française et la première obédience libérale au monde. Et c’est dans cette Région que nous comptons le plus de Loges, sachant que Paris est divisé en quatre régions».
«Le camp des Milles: site remarquable tant dans sa dimension mémorielle que réflexive»
La première étape de sa visite a été pour le Camp des Milles: «J’ai pu découvrir ce site remarquable tant dans sa dimension mémorielle que réflexive. C’est un outil pédagogique essentiel». Visite d’autant plus importante «que nous organisons une visite à Auschwitz les 4 et 5 avril 2020. Voyage pour lequel nous avons dû arrêter les pré-inscriptions car nous avons très rapidement compté 1 600 inscrits. Je prononcerai à cette occasion un discours qui sera également lu, pour tous ceux qui ne peuvent pas venir, dans des lieux mémoriels en France, au rang desquels certainement le Camp des Milles». Pour Jean-Philippe Hubsch, ce déplacement à Auschwitz n’est pas anodin: «Nous connaissons une montée de l’antisémitisme, du racisme, de l’anti-maçonnisme… Se rendre en ces lieux permet de sentir la souffrance de ceux qui y sont passés… ». L’occasion de rappeler : «Notre position est très claire, nous sommes opposés à tous ceux qui ne respectent pas nos valeurs: liberté, égalité, fraternité auxquelles nous ajoutons laïcité et solidarité. Nous sommes en complet désaccord avec l’extrême droite et une partie de l’extrême gauche qui fonde l’antisionisme, porte d’entrée vers l’antisémitisme». De même, le 11 janvier 2020, le Grand Orient prépare avec des associations «et sans doute des partis politiques» une grande manifestation en mémoire de l’attentat contre Charlie Hebdo, le 7 janvier 2015 à Paris. «Car nous étions nombreux après cet attentat à être Charlie et nous le sommes malheureusement beaucoup moins aujourd’hui».
Les Universités populaires maçonniques
Dans ce contexte de crise, le Grand Orient a décidé d’aller débattre des grands thèmes de société dans des villes moyennes. «Le mouvement des gilets jaunes mais aussi le grand débat qui s’en est suivi a montré qu’il existait chez nos concitoyens une soif de débattre. Nous avons donc lancé les Universités populaires maçonniques. La première s’est tenue le 28 octobre à Troyes dont le maire François Baroin n’est autre que le Président de l’Union des maires de France. Elle avait pour thème «Comment réparer les fractures territoriales ?», indique-t-il. «Nous avons ensuite été à Massy, poursuit Jean-Philippe Hubsch, sur le thème de L’antisémitisme contre la République. D’autres « villes moyennes » suivront, une fois par mois jusqu’en juillet. Nous évoquerons notamment : « La Laïcité, fondement de la République », « L’immigration, une chance pour la France ? » « Comment sauver l’école républicaine ? » « L’intelligence artificielle, ennemie de l’humanité ? »…».
«Les différences s’opposent et se combattent lorsqu’elles se regardent de front»
Puis d’en venir à ces 4e Rencontres euro-méditerranéennes regroupant plus de 200 participants venus de France, d’Espagne, du Portugal, d’Italie, d’Israël, du Liban et de Tunisie. «Un travail a été accompli en amont sur les questions de culture, de développement durable, de solidarité et de la jeunesse». La culture? «Les différences s’opposent et se combattent lorsqu’elles se regardent de front. On dit qu’elles se soutiennent et se renforcent mutuellement lorsqu’elles regardent ensemble dans la même direction». La question posée aux participants était la suivante: «Notre travail de Franc-maçon ne serait-il pas de proposer au XXIe siècle une vision de l’humanisme de demain? Dans ce bouillonnant creuset du génie des civilisations qu’à toujours été Mare Nostrum, ne nous revient-il pas, Franc-maçon, d’y lire de nouveau de quoi fédérer et associer les forces de la différence?».
«La question de la survie de l’humanité face à sa propre autodestruction»
Concernant le développement durable il est avancé que «la préservation de la biodiversité contre les pollutions et la surexploitation humaine de la mer nourricière que la Méditerranée a été depuis l’origine de l’Homme pose la question de la survie de l’humanité face à sa propre autodestruction». Puis, il est bien question de solidarité. Jean-Philippe Hubsch dévoile: «Nous avons beaucoup travaillé sur la question des migrants, une problématique dramatique qui va marquer durablement nos sociétés. Nous avons rédigé l’an dernier, au mois de mars, un document aux politiques, avant les Européennes pour les interpeller sur la question des mineurs isolés. Nous avons avancé une quinzaine de propositions. Et cette année, nous proposons de rétablir le passeport Nansen, imaginé en 1921 et créé le 5 juillet 1922 à l’initiative de Fridtjof Nansen, premier Haut-commissaire pour les réfugiés de la Société des Nations, via l’Office international Nansen pour les réfugiés, considéré comme le premier instrument juridique utilisé dans le cadre de la protection internationale des réfugiés. Et il s’agit aussi de mettre fin aux accords de Dublin qui fixent les migrants dans le pays où ils débarquent. Si on a pu voir une alliance brune/rouge arriver au pouvoir en Italie c’est la faute des voisins de ce pays qui leur ont laissé les migrants et leur ont donné en plus des leçons». Pour les francs-maçons «il paraît essentiel de voir comment l’espace de la Méditerranée peut devenir, voire redevenir, non pas une frontière politique et culturelle soumise aux diktats destructeurs des extrêmes politiques et religieux, mais bien le ciment de l’émancipation de la jeunesse permettant d’en faire un espace d’échanges intellectuels et progressistes».
Michel CAIRE