Marseille. Avec « Pain Salvator », Nicolle Weber signe une reconversion réussie dans la boulangerie biologique

On pourrait dire qu’elle est adepte du grand écart. Contrainte de quitter son poste de directrice de la formation continue à la suite d’une restructuration, Nicole Weber a décidé de se réinventer et de créer Pain Salvator. Une reconversion risquée mais un pari gagné.

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Le Pain Salvator, une boulangerie biologique au coeur de Marseille (Photo Joël Barcy)

 « Le levain c’est mon bébé »

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Nicolle Weber, fondatrice du Pain Salvator (Photo Joël Barcy)

En écoutant Nicolle Weber vous êtes obligés de manger son pain avec respect. Elle est incollable sur les bienfaits du levain naturel. Un bébé qu’elle élève depuis 2016 et cajole comme un petit. «Quand on créé son premier levain, on flippe. Il faut s’en occuper comme un bébé. Lui donner à manger toutes les huit heures. S’il a froid il ne pousse pas. S’il a trop chaud, il s’effondre… On va voir toutes les heures s’il respire. On le regarde et s’il fait un peu de mousse on s’inquiète car il peut développer des moisissures », raconte-t-elle, sa boîte Tupperware de levain tenue sous le bras comme un enfant. Ce levain originel a depuis ensemencé des générations de levain. Mais attention pas question de l’abandonner pour les vacances: «On part avec lui, on le met un peu à la diète, on le nourrit une fois par semaine ». Mais pas question de partir sous les tropiques ou à la neige, il fait trop chaud ou trop froid

« Toute la vie de la boulangerie repose sur lui »

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(Photo Joël Barcy)

« On a peur quand on ouvre son entreprise », confie Nicolle Weber. « On se dit s’il me lâche ma boîte elle coule. La richesse ce n’est pas la farine ou le pain. C’est le levain ». En quittant son métier, Nicolle Weber s’est lancée dans la boulangerie bio car elle voulait manger ce pain et Marseille ne regorgeait pas de boulangerie de ce type. Alors va pour une formation dans l’école internationale de la boulangerie biologique à Noyers-sur-Jabron (04). Une institution réputée. Depuis elle est incollable sur les bienfaits du levain. « Vous vous rendez compte il suffit d’ajouter un gramme de levain de seigle à 100 g de farine et 120 g d’eau et vous avez un pain. Un gramme de levain compte des millions de bactéries et il rend biodisponibles tous les minéraux qu’il y a dans la farine. Il digère une partie de l’amidon donc les glucides et le sucre qu’il y a dans le pain ; Donc cela donne un pain riche en minéraux et pauvres en glucides, digeste ».

Donner du temps au temps

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Les boulangers s’activent dans le laboratoire (Photo Joël Barcy)
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(Joël Barcy)

Au Pain Salvator on pratique une fermentation longue. 18 heures en moyenne. Hugo Missonnier assure ce jour-là les divers pétrins et le façonnage de la pâte. « Vous voyez ces petites bulles qui se forment ça et là. C’est ce qui démontre qu’il y a vraiment de l’activité, que les ferments sont en train de manger les glucides», explique-t-il. A côté Xavier Couillerot, chef boulanger, manie la grigne avec dextérité devant le four à pain. Ses coups de lame précis sur les pâtes permettent de donner une esthétique mais surtout de canaliser la sortie des gaz lors de la cuisson en créant des faiblesses dans la croûte du pain. « La fermentation longue, 3 heures à température ambiante avant le façonnage puis 15 heures en chambre froide où l’activité bactérienne se poursuit, développe les arômes et renforce la digestibilité du pain. Une fois le grignage effectué on passe à la cuisson ». Le pain peut ensuite se garder une semaine.

Un art de vivre

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(Photo Joël Barcy)

Le label agriculture biologique et fermentation longue va au-delà d’un juste effet de mode pour Nicolle Weber: «C’est une façon de concevoir sa relation au monde et la place qu’on a dans le monde. Vouloir manger des aliments biologiques, biosourcés, bien fait, d’aimer ce qu’on fait, être raccord avec la nature, avec les gens avec lesquels on travaille. C’est tout un ensemble ». Pour être en accord avec cette vision, les boulangers du Pain Salvator ne commencent qu’à 5 heures du matin pour respecter leurs rythmes biologiques et la boulangerie ouvre en conséquence… vers 9 heures. En parallèle le mari fait trois marchés par semaine.

Cet art de vivre n’est pas préjudiciable économiquement. Le bébé à beaucoup grossi depuis l’ouverture. « Un peu trop à mon goût », ajoute Nicolle, mais c’est le projet qui nous embarque». Depuis l’ouverture le chiffre d’affaires a été multiplié par 5.

Reportage Joël BARCY

Boulangerie-Café  Pain  Salvator  au 32, boulevard  Louis Salvator – 13006 Marseille

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(Joël Barcy)

 

 

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