Publié le 28 août 2014 à 22h30 - Dernière mise à jour le 27 octobre 2022 à 18h08
À Marseille, la Comex (Compagnie maritime d’expertises) société spécialisée dans l’ingénierie et le monde sous-marin travaille sur l’entraînement des spationautes sous la Méditerranée.
Pour ce faire, l’institut des Sciences du Mouvement d’Aix-Marseille Université (UMR-CNRS 7287), en partenariat avec la Comex, vient de conduire une étude inédite sur la motricité en milieu subaquatique, nommée « Simexplor ».
Les chercheurs ont donc réalisé, mercredi et jeudi, avec le soutien du Centre National d’Etudes Spatiales (CNES), une série d’expériences en bassin sur le site de la Comex. L’objectif étant d’analyser «finement, explique Lionel Bringoux,de l’Institut des Sciences du Mouvement, un scaphandre unique au monde, nommé «Gandolfi».
Ce dernier, fabriqué par la Comex en partenariat avec Dassault et l’Agence spatiale européenne (ESA) est un scaphandre immergeable «capable, grâce au système de ressorts de ses articulations, de reproduire les spécificités d’encombrement et les contraintes de rigidité d’un vrai scaphandre dans l’espace», précise Peter Weiss, responsable de la division Espace innovation de la Comex. « Ce scaphandre, poursuit-il, a été développé dans les années 90 dans le cadre programme de la navette spatiale européenne Hermès pour l’entraînement des spationautes». Plus de 20 ans après la fin prématurée du programme spatial européen Hermès, la Comex n’a pas renoncé à se développer dans un domaine techniquement très voisin de grandes profondeurs : l’espace. Et, depuis 2 ans, souligne Peter Weiss, le scaphandre a repris du service. Notamment des simulations en Méditerranée. « Il y a un an, la Comex a organisé une simulation de la première mission Apollo XI sur la lune, sur un fond marin dans la rade de Marseille identifié comme un site analogue.»
Et pour valider les mouvements avec ce scaphandre, la Comex a donc fait appel au CNRS pour mener nombre de tests.
Muni de capteurs, le fameux scaphandre devient sujet d’expériences dans des conditions d’immersion. Huit plongeurs agrémentés, ont eu pour mission «de pointer en direction des cibles allumées, le plus rapidement, avec les contraintes de précision, des tailles de cibles différentes.L’organisation du geste, observée lors de mouvements, de pointage est analysée. «« Gandolfi » permet de simuler en pratique n’importe quelle valeur de gravité entre 0 et 1g, en partie du fait que le plongeur est immergé lui-même dans le scaphandre», est-il souligné
«Ce projet permettra de valider l’intérêt de l’entraînement en piscine pour les spationautes dans un scaphandre « en eau » comme Gandolfi par rapport à d’autres méthodologies d’entraînement actuellement mises en œuvre»,assure le chercheur.
Au total 84 tests réponse-pointage ont été étudiés, chacun des gestes ayant été enregistré par un système de caméras sous-marine développé par Jean-François Bramard de la société Cambulle.
«La plus-value attendue pourra ainsi se traduire en termes de réalisme de simulation des activités en impesanteur, puisqu’un tel entrainement pourrait permettre aux spationautes d’être efficaces plus rapidement au cours de leur mission spatiale, comme lors des sorties extra-véhiculaires à partir de la Station Spatiale Internationale (ISS)», avance Lionel Bringoux. Annonçant également «un coût moindre par rapport au simulation en vol parabolique.»
Derrière cette expérience un projet se construit. La Comex est, en effet, inscrite dans un projet européen qui prévoit «la construction d’un 2e scaphandre, plus moderne, plus léger, pour effectuer des tests dans la baie de Marseille», dévoile Peter Weiss . Il se projette dans l’avenir: «En 2018, la station internationale va cesser ses activités. Il y a différentes possibilités envisagées: un retour sur la lune, s’installer sur des astéroïdes ou encore sur Mars. On veut se positionner pour l’entraînement de ce type de mission non pas dans une piscine mais en mer avec des fonds naturels. Nous avons identifié dans la rade de Marseille, plusieurs sites autour de l’archipel du Frioul pour ce type de mission.»
In fine, combien coûte un Gandolfi ? «Une fraction de ce que coûte une combinaison spatiale», estime Peter Weiss.
Patrica MAILLE-CAIRE