Publié le 23 octobre 2015 à 23h11 - Dernière mise à jour le 27 octobre 2022 à 20h42
La Mutuelle de France Plus, en partenariat avec le Comité Mutualiste Portuaire a organisé un débat sur «70 ans de la Sécurité Sociale : Quels enseignements et quelles perspectives?». Sur les murs, une exposition, retrace les grandes heures de la Sécu à Marseille, comme autant de rappels. Mais point question de nostalgie, de commémoration, le débat était bien centré sur le présent, l’avenir, notamment avec les interventions de Jean-Paul Benoit, président de la Fédération des mutuelles de France, et de Serge Jacquet, président de la Mutuelle de France Plus et de Solimut.
Alain Barthes, collectif CGT Santé rappelle en premier lieu un principe fondateur de la Sécu : «Chacun contribue selon ses moyens et reçoit selon ses besoins»; avant de considérer: «Une sécurité sociale, des principes, qui ont été attaqués, réforme après réforme. Aujourd’hui, le système est à bout de souffle et s’est transformé en vache à lait pour les multinationales du médicament». Un peu d’histoire s’impose. Georges Sinibaldi, retraité docker CGT raconte: «C’était important d’être protégé par la Sécu et la Mutuelle, surtout que, dans ma jeunesse, cela ne brillait pas trop dans nos chaumières, il n’y avait pas d’eau, le risque de maladies était donc grand». Et, sur le Port, poursuit-il: «Le danger était grand aussi, les accidents nombreux et on dénombrait en moyenne 12 morts par an».
Des propos qui permettent à Serge Jacquet d’indiquer : «Nombre de personnes, notamment les jeunes, pensent que la Sécu a toujours existé, qu’elle existera toujours, c’est faux. Le rappeler est important, pas pour commémorer mais pour aller de l’avant.». La question, pour lui, est de savoir «comment on améliore le système à partir de son histoire, cela alors que le projet de loi de financement de la sécurité sociale 2016 porte de nouvelles atteintes à la sécu, la dénature. Face à cela il faut rappeler ses principes d’universalité, de solidarité, d’égalité, pour poursuivre ce système essentiel dans le cadre du pacte Républicain». Le mutualiste souligne: «Bien sûr qu’il faut prendre en compte la dimension économique de ce dossier, mais si l’on en reste là on se trompe, il faut partir de choix politiques et prendre la mesure des nouvelles questions, parmi lesquelles le vieillissement».
Selon Jean-Paul Benoit, le trou de la Sécu «est cultivé, instrumentalisé pour la faire régresser». En ce qui concerne le financement, indique-t-il: «Il faut prendre en compte l’évolution de la société et donc la financer à partir du travail mais aussi du capital. La Cour des Comptes vient de montrer que les exonérations et exemptions de cotisations représentent plus de 50 milliards d’euros soit de quoi, non seulement boucher le trou, mais rendre la Sécu excédentaire». Il dénonce le fait que les pouvoirs publics aient ajouté 15% de taxes aux Mutuelles, les rendant plus chères.«Et, aujourd’hui, nous avons 4 millions de personnes exclues». Il met en garde les divisions, les propos sur les fraudeurs, les étrangers qui creuseraient le trou de la Sécu… : «La vraie cause du trou c’est l’exonération; les vrais fraudeurs ceux qui imposent le travail au noir, les salariés non déclarés. Et, non, les migrations ne contribuent pas au trou de la Sécu; non, il n’y a pas de dettes d’État tiers. Et les réfugiés ne coûtent pas un euro à la Sécu. Des réfugiés que nous avons toujours accueillis : Arméniens, Italiens, Espagnols… et si nous ne sommes plus capables d’avoir un minimum de générosité alors, nous ne méritons pas d’avoir la Sécu.». Il renchérit : «Les migrants non seulement ne creusent pas le trou mais au contraire ils le comblent puisque, une fois à la retraite, majoritairement, ils rentrent dans leur pays d’origine et ne perçoivent pas la totalité des sommes auxquelles ils ont droit. Celle qui dit le contraire (Marion Maréchal-Le Pen ndlr) est une menteuse et, si demain elle est élue présidente de la Région cela sera tragique». Serge Jacquet de citer Simone Veil, qui, pour les soixante ans de la Sécu avait lancé : «Là où il y a sécurité sociale, la dignité de l’Homme est mieux respectée que là où elle n’existe pas». Il conclut: «Depuis elle ne cesse d’être attaqué. L’enjeu, pour nous, pour les jeunes générations est là, la dignité de l’Homme».
Michel CAIRE