C’est sa méthode, du terrain et des petites phrases pour définir sa politique. Le nouveau ministre de la Justice a passé une journée dans la cité phocéenne à la rencontre des magistrats et des personnels pénitentiaires. Il veut « nettoyer les prisons, taper les narcotrafiquants au portefeuille et faire respecter la République ». Il veut agir vite mais encore faut-il que les moyens suivent.
Du mieux
Gérald Darmanin a voulu en premier lieu saluer les bons chiffres de l’année 2024 en matière de lutte contre le narcotrafic à Marseille. « On a eu 50% de règlements de comptes en moins par rapport à 2023 (49 morts) et plus de 3 000 personnes interpellées pour trafic de drogue, c’est 40% de plus ». Mais ces éléments ne suffisent pas. Il faut poursuivre la lutte selon le ministre: « taper au portefeuille en confisquant les biens mal acquis comme les voitures, les appartements mais il faut aussi mener cette action à l’étranger. »
Menaces et corruption
Le garde des Sceaux est aussi revenu sur les menaces, la corruption qui peuvent toucher les personnels judiciaires ou pénitentiaires. Quand la pieuvre s’étend, les organisations criminelles atteignent une puissance financière telle qu’elles peuvent menacer l’État. Face à cette menace, il estime, comme le ministre de l’Intérieur, qu’il faut « s’inspirer de la lutte contre le terrorisme. Cela passe par du renseignement, de la mise à l’isolement, peut-être par des juges encore plus spécialisés et par un renseignement administratif sur nos agents. Hier, nous suivions ceux qui se radicalisaient aujourd’hui il faut sans doute suivre ceux qui sont sensibles à des faits de corruption. Même s’ils sont très minoritaires, ils existent et la République doit y être particulièrement attentive.»
« Nettoyer » les prisons
Des trafics ou meurtres commandités depuis des cellules de prison ont défrayé la chronique et stupéfait le grand public. Parfois, à l’isolement, la vie continue comme à l’extérieur. Des rapports ont été commandés notamment à la prison de Luynes où un caïd a appelé la police afin qu’elle retrouve et emprisonne le tueur à gage qui n’avait pas respecté son contrat ! « On va multiplier les actions de nettoyage des prisons. Cela a déjà été fait en partie en 2024 où plus de 40 000 portables ont été saisis mais on peut faire davantage. Mon idée est de faire en quelque sorte un appartement témoin pour les 100 plus importants narcotrafiquants qui sont dans nos prisons. 17 000 sont incarcérés pour trafic de drogue. On va isoler particulièrement ces personnes, en les fouillant particulièrement et en brouillant particulièrement leurs communications», explique le ministre de la Justice. Reste un bémol, le coût d’un brouillage généralisé estimé à 500 millions d’euros et la surpopulation des prisons. Le taux de remplissage est de 130% en France et 185% aux Baumettes. Gérald Darmanin balaie ces éléments d’un revers de la main. « Nous avons su le faire pour les acteurs du terrorisme. Ce qu’il faut faire dans la vie ce sont des choix. Je pense qu’avec un peu de moyens, de la volonté et une simplification des procédures on doit être capable d’isoler 100 détenus sur 82 000 ».
Visite copieuse
Arrivé ce jeudi matin à 8h15 au tribunal judiciaire de Marseille, le ministre a rencontré magistrats et avocats avant une réunion avec le personnel pénitentiaire puis de celui de la protection judiciaire de la jeunesse. Le garde des Sceaux veut immédiatement imprimer sa marque en matière de lutte contre le narcobanditisme qui est aussi la priorité de son collègue de l’Intérieur. Bruno Retailleau qui n’avait pas non plus manqué l’étape de Marseille.
Reportage Joël BARCY