Publié le 27 septembre 2014 à 22h29 - Dernière mise à jour le 27 octobre 2022 à 18h12
Nul ne sait si la fille du facteur était parmi eux, mais ce qui est sûr c’est que les chercheurs marseillais ont mis du cœur à l’ouvrage, ce samedi 27 septembre, pour rejoindre, à bicyclette, Aix-en-Provence, première étape pour eux en direction de Paris, dans le cadre de «Sciences en Marche». Une marche qui a pour objet de demander au Président de la République de prendre trois mesures pour stopper le déclin de la recherche française : la mise en œuvre d’un plan pluriannuel ambitieux pour l’emploi statutaire de scientifiques; le renforcement des crédits que les laboratoires et les universités reçoivent de leurs tutelles; une meilleure reconnaissance du doctorat d’Université dans les entreprises privées et dans la haute fonction publique.
Lætitia Houot, enseignant-chercheur à Aix-Marseille Université (AMU) ne mâche pas ses mots pour dénoncer un système «dans lequel les laboratoires fonctionnent essentiellement avec des précaires, jusqu’à 40%. C’est à dire que nous sommes entré dans un système où on forme des gens qu’on ne peut garder. C’est à dire qu’ils doivent, après des années d’étude, soit partir à l’étranger, soit se recycler». Et d’insister sur l’enjeu de société que représente la recherche: «Le développement des connaissances, dans toutes les disciplines, a toujours été un des fondements de l’humanité. Ce développement est d’autant plus crucial pour comprendre et appréhender les changements très rapides que connaissent nos sociétés et pour éviter de léguer aux générations futures un monde à l’agonie».
Elle précise : «Et il n’y a pas que les chercheurs et les enseignants-chercheurs qui voient leurs effectifs se réduire. Les personnes qui travaillent avec nous, qui nous libèrent du temps pour nos recherches, sont aussi touchées. Résultat : nous devons passer de plus en plus de temps à chercher de l’argent, au détriment de nos étudiants et de nos recherches». Et de lancer : Il faudra bien que le gouvernement comprenne que ce n’est pas en investissant dans la bougie qu’on a découvert l’électricité».
Elle ajoute à ce propos : « Il faut bien être conscients que nous ne pouvons pas rivaliser avec les pays émergents sur les secteurs où la main-d’œuvre est peu qualifiée et les salaires très bas. Donc, pour maintenir, développer notre économie, nous n’avons d’autres choix que d’augmenter les investissements dans la recherche et l’enseignement supérieur».
Elle dénonce : «On nous dit que les budgets ne faiblissent pas en matière de recherche. Sans doute, le problème c’est que l’argent n’arrive plus dans les laboratoires. Il part dans des Crédits impôts recherche et développement (CIRD. Or, si dans les PME on peut mesurer le besoin de moyens pour l’innovation, pour les grandes entreprises qui absorbent 65% de ce crédit, les conditions d’attribution devraient être revues en profondeur. La Cour des Comptes s’en est d’ailleurs plusieurs fois inquiétée avançant que « l’évolution qu’a connue la dépense intérieure de recherche et développement des entreprises n’est pas à ce jour en proportion de l’avantage fiscal accordé »».
Lætitia Houot de rappeler enfin: « La France est le seul pays où les docteurs ne sont pas reconnus dans les grilles. Nous réclamons donc une meilleure reconnaissance, tant dans le public que le privé ».
Michel CAIRE