Publié le 6 mars 2014 à 22h30 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 13h43
C’est un moment précieux que vient d’offrir le Parvis du Protestantisme en accueillant la directrice du Théâtre National de Marseille la Criée, actrice et metteuse en scène : Macha Makeïeff. Cette dernière a évoqué son enfance, sa famille, russe blanc d’un côté, italienne de l’autre, de la conversion familiale au protestantisme. De Marseille, Paris, la Criée, le lien qu’elle construit avec le public, la population. Un moment où il fut question d’amour et d’une envie permanente de réforme… Comme quoi on ne se refait pas.
Macha Makeïeff est née à Marseille, a passé une partie de son enfance à Lyon, puis à retrouver la cité phocéenne à l’âge de 10 ans, «avec les enfants à l’école qui me demandaient d’où je venais, avec mon accent». La conversion au protestantisme ne fut pas sans impact. «Avec la foi des convertis, la pratique était très sérieuse avec des lectures quotidiennes de la Bible, des commentaires ». La jeune fille grandit, à envie de monter à Paris, de théâtre, ce théâtre que Calvin avait interdit. La parole biblique se mariant mal avec le mensonge théâtral. «Longtemps, d’ailleurs, je ferais un théâtre silencieux», dévoile-t-elle
Le théâtre où le mensonge, souvent, dit bien plus de vérité que le réel. Le théâtre qui permet de passer de la confrontation de l’individu, seul, face à Dieu, au lien social. «Le théâtre, même si on est seul sur scène, est une aventure collective, avec les techniciens, avec le public ». Macha Makeïeff effectue une carrière brillante à Paris, puis, un beau jour, apprend que la direction de la Criée est libre. Et, une nouvelle fois, c’est le retour à Marseille. «La première année fut difficile, solitaire… Mais l’inconfort favorise la création ».
Macha Makeïeff en profite pour rendre hommage à ses équipes. Explique son ambition d’avoir un lieu ouvert à d’autres formes artistiques : musique, danse, cinéma, arts plastiques. Un lieu ouvert l’après-midi, ouvert à tous les publics : «Nous allons entreprendre une action en direction de la population de Noailles » (quartier populaire du centre-ville de Marseille). D’expliquer les raisons qui l’ont poussée à revisiter Ali Baba : « « les Milles et une nuits » sont à la fois célébrées par les intellectuels et cette aventure, dans une ville méditerranéenne comme Marseille parle à tous les publics ». Le résultat est drôle, enjouée, emplie d’intelligence et d’humanité.
L’artiste est aussi directrice, au plein sens du terme, avec son équipe, là encore, elle construit sa programmation et elle se bat pour avoir des moyens supplémentaires : «Nous avons moins de subventions de l’État que les autres théâtres nationaux. Par exemple nous avons moins que Toulouse. Quand j’ai demandé pourquoi ? On m’a répondu, c’est la tradition». Et de conclure, alors que le 8 mars approche, en indiquant que lorsqu’elle a été nommée, elles étaient, grâce à cela, trois femmes à la tête d’un théâtre national, mais, très rapidement elles n’ont été à nouveau que deux. « Alors, oui, la parité lorsqu’elle existe même s’il y a une forme de brutalité dans sa mise en place, c’est une avancée».
Michel CAIRE