Publié le 10 novembre 2019 à 23h14 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 13h25
Après les commémorations du 5 novembre date à laquelle 8 personnes ont perdu la vie dans l’effondrement d’immeubles indignes, des rencontres avec les nouveaux sans-abri que sont les évacués, la semaine de la douleur ne pouvait s’achever sans une marche contre le mal-logement à Marseille. Plusieurs milliers de personnes ont participé à une marche de la dignité humaine…
Si la colère est toujours aussi présente, le cortège s’est déplacé dans le calme presque silencieux quand il a traversé la rue d’Aubagne. En tête des délogés, les banderoles déployées, sont sans appel : «Un an après « Ni pardon ni oubli »». «4 000 personnes ont été délogées» depuis le 5 novembre 2018 et de nombreux signataires dans une déclaration commune dénoncent: «L’absence de réponse à la hauteur des enjeux par les pouvoirs public». Fathi Bouaroua, co-président de Emmaüs Pointe Rouge, ex-directeur de la Fondation Abbé Pierre Paca témoigne. «On est toujours en colère parce que pendant une année, il ne s’est rien passé. A part des personnes qui sont encore évacuées alors que les solutions n’existent pas.» C’est à croire, soupçonne-t-il, qu’«ils préparent un plan de gentrification. La Mairie, a toujours eu pour intention de changer de population.» Évoque alors «les nouveaux» programmes. «Le gros souci c’est qu’il n’y a pas de programmes nouveaux. Les programmes qu’ils nous ont annoncés, le fameux PPA (Plan partenarial d’aménagement ndlr) était déjà dans les tiroirs. Un ancien programme que l’on nous a ressorti. C’est ça une manière de répondre à un état de guerre comme connaît aujourd’hui Marseille? C’est un scandale.» Au niveau des financements, il rectifie: «Quand on nous parle de 660M€ que la collectivité publique veut mettre sur la table, il faut savoir que ce montant était déjà promis bien avant le drame. Et en plus, on nous dit qu’il va falloir les dépenser en quinze ans, cela fait combien de millions par an ? Il y a donc bien des raisons à la colère». Colère encore car, ajoute Fathi Bouaroua, «en plus de ne rien faire, en plus de ne pas s’excuser, on expulse des gens sans qu’ils aient de véritables solutions. 600 familles sont aujourd’hui en attente à l’hôtel d’un relogement » Et d’asséner:«Comment peuvent-ils encore continuer à déloger les gens alors qu’ils ne leur donnent pas de logement; que les logements sociaux manquent; que 14 400 SDF sont encore à la rue, et je ne parle pas des bidonvilles, 2 000 personnes vivent dans des conditions déplorables, et je ne parle pas non plus des migrants pour lesquels aucune solution n’existe. Il y a de quoi avoir une véritable colère sur ce traitement du logement et en particulier pour ceux qui en ont besoin». Le 25 novembre sera rendu public le rapport de la Chambre régionale des comptes Paca qui étrille la gestion de la ville par Jean-Claude Gaudin. Un rapport à charge dont le contenu a déjà été largement dévoilé. Pour Fathi Bouaroua ce rapport pourrait «permettre à la population de comprendre que les élus actuels et d’autres élus qui se présentent aux municipales ne répondront pas aux besoins des Marseillais parce qu’ils vont encore donner cette ville aux affairistes. Pour preuve, affirme-t-il: «Depuis une dizaine d’années, on n’a jamais vu ça, le patrimoine municipal a été offert… alors que nous avons besoin de surfaces, de foncier pour loger tous les Marseillais qui sont aujourd’hui à la peine». Mireille BIANCIOTTOEntretien avec Fathi Bouarouafathi_bouaroua_marche_du_samedi_9_11_2019.mp3 Propos recueillis par M.B. |