Marseille. Théâtre Toursky: Aurélia Decker enflamme Festi’Femmes

Publié le 27 février 2022 à  13h28 - Dernière mise à  jour le 4 novembre 2022 à  15h50

Via une galerie de femmes aussi irrévérencieuses qu’« atta-chiantes », Aurélia Decker dresse un portrait acide et résolument moderne de la place de la femme d’aujourd’hui pour mieux nous rappeler que si un homme est «une femme comme les autres», une femme, elle, est «un homme comme les autres»… mais en pire !

Aurélia Decker:
Aurélia Decker:

Dans le cadre du Festival Festi’Femmes donné sur deux jours au Toursky de Marseille le journaliste de « La Provence » Jean-Jacques Fiorito, spécialiste de sports et de culture a ouvert la voie du rire débridé. On ne sait pas toujours en effet que cet homme drôle à souhait, et excellente plume du quotidien régional poursuit en parallèle une carrière d’humoriste qu’on ne qualifiera pas d’amateur tant le talent du bonhomme est grand. C’est du côté de ses souvenirs professionnels qu’il a entraîné le public du Toursky qui juste avant lui avait eu droit à trois découvertes très inégales, trois jeunes femmes sympathiques, à classer dans la rubrique «nouveaux talents 2021 ». Évoquant d’authentiques interviews réalisés avec David Hallyday dont l’attachée de presse avait exigé qu’on ne parle pas de son père, de sa femme, de ses enfants, de sa vie privée; Pascal Obispo présenté comme un faux gentil, ou encore Julio Iglesias (il prend alors l’accent espagnol), Jean-Jacques Fiorito balance pas mal et la salle croule sous les rires. Outre une belle énergie, et pas mal de faconde, le journaliste a montré qu’il savait tenir une scène et mettre le public de son côté. Puis retour à la case femmes avec l’entrée en piste de la délirante et joyeuse Aurélia Decker.

«On ne naît pas femme on le devient »

Découverte par les Aixois de la Fontaine d’Argent où Fabienne Bécu l’avait programmée à ses débuts voilà plus de dix ans, Aurélia Decker mérite bien d’être associée au sigle «Festi’Femmes». Femme elle l’est devenue assurément suivant ainsi l’idée aujourd’hui répandue que :«on ne naît pas femme on le devient», et quant au côté festif c’est avec elle du rire cinq étoiles. Ça va vite, ça fuse, c’est une ininterrompue suite de portraits de combattantes modernes de la liberté, et co-écrit avec Philippe Ferran, ce show intitulé «Femme toi-même», mêle sketches, revue de presse épinglant sans ménagement quelques boumeurs très portés sur le harcèlement féminin, moments musicaux dansés, (en toréador elle est irrésistible), et incarnation de différents types de femmes. Femme enceinte, femme fatale, femme politique, femme violée, en colère, amoureuse ou trompée, femme de ménage, femme que personne ne ménage, femme au volant, femme qu’on attend toujours au tournant, femme de tête, femme à qui on nie le fait d’être à la tête d’un projet justement, femme dépassée, femme au foyer, femme libre, femme jusqu’au bout des seins, femme harcelée, Femen, lesbienne ou pute, elle sont toutes là, traînant par moments leurs enfants derrière elles.

Montrant ainsi que la charge mentale leur appartient, car souvent les maris largués n‘ont pas été à la hauteur, Aurélia Decker expose avec un panel de portraits colorés, que si un homme «est une femme comme les autres», une femme, elle, est « un homme comme les autres mais en pire !» Et de balancer à femme que veux-tu : « Maman, c’est quoi une féministe ? C’est quelqu’un qui s’intéresse à toutes les femmes… Comme papa ? » ou encore « Je suis bipolaire. Moitié Paulo, moitié poubelle ». «Le mec de 60 ans c’est un mentor. Le mec de 40 ans c’est un menteur. Et je hais ceux de 50 ans ». «On a pensé à mesurer le QI de Einstein, pas la bite de Freud». Avec une gravité à la Desproges mêlant tragique et humour elle éprouve de la compassion pour les Ukrainiens qui se sont réveillés avec des Kalachnikov ajoutant aussitôt: «Ce qui leur rappelle leurs vacances à Marseille…. »

Gynéco syrien en Ardèche

Après avoir expliqué comment se passe la rééducation du périnée, et présenté un gynéco syrien installé dans le désert médical de l’Ardèche -« l’Ardèche attire le bédouin, c’est la montagne sans le ski, on y accouche la plupart du temps dans une voiture, si bien que la plus grosse maternité de l’Ardèche c’est la Logan… »-, Aurélia Decker se place sous l’égide du «Respire» de Gaël Faye. Ayant au préalable cité Simone de Beauvoir dont on entend la voix, elle offre un one woman show drôle et de combat où il est montré comment trop souvent les femmes face aux hommes doivent «renoncer à être soi, pour qu’ils deviennent eux.» Vaste programme, mais constat si juste.
Jean-Rémi BARLAND

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