Publié le 1 juillet 2023 à 9h48 - Dernière mise à jour le 1 août 2023 à 14h20
En raison du contexte de violences qui a frappé Marseille dans la nuit de jeudi à vendredi, Benoît Payan, le maire de Marseille, a décidé de réduire le Conseil municipal aux seules délibérations réglementaires afin de se rendre au plus vite auprès des Marseillaises et des Marseillais. Les délibérations initialement prévues à l’ordre du jour de ce vendredi 30 juin 2023, seront reportées au prochain Conseil Municipal qui se tiendra le 7 juillet 2023.
C’est un conseil municipal particulier qui vient de se tenir à Marseille, à la suite d’une nuit de violences, en accord avec Martine Vassal, la présidente de la métropole, le maire de Marseille l’a réduit aux seuls rapports réglementaires obligatoires. Les autres rapports seront débattus au conseil municipal de la semaine prochaine. «Il y a trois jours, Nahel, un jeune homme de 17 ans a été tué. Rien ne peut justifier qu’à 17 ans, on perde la vie, un petit matin, lors d’un contrôle routier», souligne le maire qui considère: «Aucun mot ne peut exprimer notre tristesse et notre refus de l’injustice. Et je veux dire aussi qu’aucune violence pour les exprimer n’est tolérable. Les violences et les dégâts causés cette nuit dans notre ville sont inacceptables. Notre ville sera toujours, sans ambages, du côté de la justice, de la dignité et de la responsabilité».
«Je veux que la justice passe»
Il insiste: «je veux que la justice passe, qu’elle passe vite et que toute la lumière soit faite. Mais parce que la violence et la division ne servent que les discours de haine qui fracturent notre société, Marseille doit être exemplaire. Depuis trois nuits partout en France, la violence s’exacerbe». «Ce matin (vendredi matin NDLR), poursuit-il alors que Marseille se réveille après une nuit de violence, que des magasins ont été fracturés, que la bibliothèque de l’Alcazar a été vandalisée, des vitrines brisées, des poubelles brûlées, mes premiers mots seront pour les Marseillais, pour les Marins-Pompiers, mobilisés sans relâche, et pour les forces de sécurité, auprès de qui j’ai passé la nuit à suivre la situation». Et rappelle que: «toute la nuit et encore ce matin (vendredi matin), de nombreux agents de la Ville et de la Métropole se mobilisent, partout dans Marseille, pour nettoyer et réparer les dégâts d’une soirée éprouvante».
Ni stigmatisation, ni récupération
Et d’annoncer son programme à la sortie du conseil municipal: retour auprès
de la Préfète de Police, visite de l’Alcazar, déambulation dans les quartiers pour un échange avec les commerçants du centre-ville «pour lesquels j’ai décidé de mettre en place une aide financière exceptionnelle». Puis à destination des élus présents au sein de l’hémicycle municipale, il demande : «Ni stigmatisation, ni récupération, unité et apaisement».
«Unité et justice pour la mémoire de Nahel»
«Notre responsabilité d’élus, notre responsabilité dans cet hémicycle, c’est de nous montrer dignes. Aujourd’hui, la loi nous oblige à voter certains rapports et nous le ferons», précise Benoît Payan qui déclare: «Unité et justice pour la mémoire de Nahel. Unité pour la justice et pour la paix. Unité pour Marseille et pour les Marseillais». C’est peu de dire que son message ne passera pas auprès du Zemmouriste (ex RN), Stéphane Ravier ce qui vaudra à ce dernier une réponse cinglante de la maire-adjointe Samia Ghali.
«Un seul objectif mettre la République à genoux»
Catherine Pila, LR, réagit «Un jeune est mort, un policier est incarcéré. Je pense aux deux familles. Hier soir (jeudi soir), nous avons vu des scènes de guerre civile, de chaos urbain. Nos pompiers, nos forces de l’ordre ont été la cible d’émeutiers qui avaient un seul objectif mettre la République à genoux. Rien ne saurait justifier de tels événements. On brûle de écoles, des commerces, du mobilier urbain, des commissariats, des édifices publics…». Elle dresse un bilan de la nuit marseillaise: «38 policiers blessés, 56 interpellations, 120 poubelles brûlées, 10 véhicules incendiés, des bus caillassés, le tram bloqué, des services publics à l’arrêt, des commerces pillés, des devantures détruites, l’Alcazar méconnaissable…». Pour l’élue: «Nous avons la lourde responsabilité d’appeler au calme et à l’apaisement. L’extrême gauche marseillaise a fait tout le contraire en soufflant sur la braise de l’insurrection et en encourageant les manifestants à la violence». A ses yeux: «il importe de garder raison. La justice va faire son travail».
«Ce qui s’est passé hier ce n’est pas de la protestation»
Joël Canicave, pour le Printemps marseillais, apporte tout son soutien «aux Marseillais qui ont vécu avec stupeur une nuit difficile». A son tour il considère que «la mort de Nahel et les images que nous avons tous vues nous ont profondément choqués voire horrifiés. La mort d’un adolescent de 17 ans ne peut être acceptée et ne doit pas être acceptée et nous espérons tous que la justice sera rendue le plus vite possible. Mais ce qui s’est passé ce n’est pas de la protestation. Une fois la manifestation pacifique terminée nous avons assisté à une déchaînement de violence».
«L’exigence de sécurité dans une démocratie est saine et juste»
Pour Fabien Perez, EELV: «L’exigence de sécurité dans une démocratie est saine et juste mais elle ne doit pas prendre le pas sur ce qui fonde le socle de nos valeurs démocratiques». Et de juger: «Les forces de l’ordre font souvent un travail exemplaire et nécessaire encore faut-il qu’elles puissent elles-mêmes respecter la loi et c’est pourquoi tout dérapage des forces de l’ordre est inacceptable».
«Avec vous on n’est jamais déçu»
Le RN ne s’exprimera pas, seul le Zemmouriste prendra la parole pour la droite extrême et, comme le dira le maire au terme de son intervention: «Avec vous on n’est jamais déçus». Et effectivement Stéphane Ravier d’éructer: «Le mythe du multiculturalisme et du vivre ensemble n’est plus. Il s’est écroulé sous le poids de la haine non seulement de la République mais surtout de la France». Et de placer tous les codes, tous les mots qui rapportent au Scrabble de la haine: «40 ans d’une politique suicidaire d’immigration massive entretenue tant par les pouvoirs publics de gauche que de droite et, en même temps, une politique judiciaire laxiste ont créé un ennemi de l’intérieur qui se déchaîne depuis un fait divers tragique à Nanterre». Il savoure, et peu importe à ses yeux de savoir qui est dans la rue, d’où vient la violence: «Votre Marseille fantasmé, votre Marseille de la tolérance, du vivre ensemble a volé en éclat». Comme un vœu pour se garantir un avenir politique. Et, quand on haine on ne compte pas: «Le pays est en danger de mort».
«Nous avons deux familles touchées»
Le macronien Lionel Royer-Perreaut considère pour sa part: «Il y a le drame d’une mère qui a le droit de crier sa douleur et on doit l’entendre. Puis il y a une famille qui a un père incarcéré qui est aussi confrontée à la douleur, un policier qui avait des états de service irréprochables». Et d’inviter: «Laissons la justice faire son travail, le Parquet a requis l’incarcération et nous avons deux familles touchées». Puis de dénoncer à son tour les violences et de considérer: «Notre responsabilité collective est d’appeler au respect de la République».
«Cet enfant n’aurait jamais dû perdre la vie»
«Cet enfant n’aurait jamais dû perdre la vie» lance Samia Ghali pour qui on ne peut comparer le sort des deux familles: «Celle de Nahel pleure un mort, tel n’est pas le cas de celle du policier. Le Procureur de la République a dit qu’il n’y avait pas de légitime défense donc non, non et non la situation des deux familles n’est pas la même et si on laisse penser cela la République n’est plus la République». Puis de tenir à saluer les territoires de Marseille «qui n’ont pas bougé. Les Marseillais qui ont aidé les marins-pompiers à éteindre les feux et cela aussi doit être dit». Puis de dénoncer: «Je dis à ceux qui détruisent des services publics, des bibliothèques, des écoles,s’attaquent à ce qui va servir à beaucoup de Nahel, qu’ils font du mal à ceux qui souffrent déjà». L’élue ajoute alors: «Nous avons de la peine et cela nous rappelle d’autres drames, d’autres meurtres et monsieur Ravier nous avons réclamé pendant des années que la mémoire d’Ibrahim Ali soit honorée et c’est cette majorité qui l’a fait. Monsieur Ravier, c’est vous qui n’aimez pas la France parce que lorsqu’on aime la France on veut qu’elle soit apaisée et républicaine».
Michel CAIRE