Publié le 19 février 2016 à 23h33 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 13h44
«Nous avons perdu un combat mais nous n’avons pas perdu la guerre. Alors, si aujourd’hui nous sommes un peu consternés nous saurons rebondir», Robert Dagorne, le maire LR d’Eguilles donne le ton à la réunion organisée au sein de la mairie d’Aix-en-Provence par les opposants à la métropole quelques heures après que la décision du Conseil Constitutionnel ait été rendue; laquelle valide la répartition des sièges au sein de la métropole Aix-Marseille-Provence.
Roger Pellenc, le maire DVD de Pertuis, envisage pour sa part de saisir la Cour Européenne des Droits de l’Homme tandis que Maryse Joissains, maire d’Aix-en-Provence entend s’adresser directement au Président de la République afin que, comme pour Notre-Dame des Landes, il organise un référendum local. «Dans le même temps nous ne pratiquerons pas la politique de la chaise vide, et, attention, prévient-elle, que l’on ne cherche pas à punir nos habitants pour nos positions, sinon j’irai au pénal. Et cela ne m’empêchera pas de demander à mon Conseil municipal de se prononcer sur la métropole». Une réunion à laquelle participaient également Jean-Claude Ferraud, (maire de Trets), Richard Mallié, (maire LR de Bouc-Bel-Air) et Hervé Fabre-Aubrespy, (maire LR de Cabriès), ainsi que la sénatrice Sophie Joissains et Gérard Bramoullé, le premier adjoint au maire d’Aix en charge des Finances.
«La métropole Aix Marseille a été créée pour Marseille à l’initiative de Marseille»
Pour Robert Dagorne il est clair que «la métropole Aix-Marseille a été créée pour Marseille à l’initiative de Marseille. Jean-Claude Gaudin veut constituer un Établissement public de coopération… dans l’adversité, la confrontation». «Le Conseil constitutionnel a changé sa jurisprudence, s’insurge Maryse Joissains, et on peut se demander jusqu’où il va aller: puisqu’il vient de s’en prendre au principe de l’égalité des droits entre les citoyens; puisque nous apprenons qu’un Marseillais vaut trois Pertuisiens et 1,3 Aixois». Et de s’interroger : «Comment se fait-il que Jean-Claude Gaudin connaissait hier, la décision du Conseil qui n’a été rendue que ce matin?». «Notre premier rejet, lance-t-elle, concerne la métropole d’exception d’Aix-Marseille notre deuxième rejet concerne Marseille et ses déficits qui attendent Aix et le Pays d’Aix pour se refaire une santé. Nous ne laisserons pas faire, nous demandons des audits. Nous voulons bien d’une métropole de projets, nous ne voulons pas donner les clés du coffre-fort». Et d’en appeler à François Baroin, le président de l’Association des Maires de France «qui ne peut rester indifférent devant une décision qui fait que les habitants des communes agricoles et des communes moyennes seront des citoyens moins importants que ceux des grandes villes». Considérant: «Cette décision doit mettre fin aux allers-retours entre les cabinets ministériel et la cour de cassation».
«Jamais je n’aurais imaginé que le conseil constitutionnel allait prendre une telle décision»
Roger Pellenc avoue : «Jamais je n’aurais imaginé que le Conseil constitutionnel allait prendre une telle décision car, pour moi, les citoyens étaient égaux, selon la Constitution. Son article 3 affirmant que le suffrage peut être direct ou indirect dans les conditions prévues par la Constitution. Il est toujours universel, égal et secret. Or, avec cette décision, il n’est plus égal». Alors, désabusé, il avance : «Pour nous c’est compliqué, alors il faut comprendre nos citoyens qui ne comprennent plus rien et qui se réfugient dans l’abstention, la violence ou le vote extrême». Hervé Fabre-Aubrespy considère: «La décision du Conseil est surprenante. Je suis également étonné que certains aient pu connaître la veille la décision. Pour avoir été au cabinet d’un Premier ministre, je peux vous dire que nous n’apprenions les décisions que quelques minutes avant qu’elles ne soient rendues publiques. Maintenant, je m’incline devant la décision de justice mais cela ne règle en rien la question de l’élection du président, en novembre et, dans tous les cas, il nous faudra être extrêmement combatifs pour faire prévaloir nos points de vue .
«On nous explique que les citoyens ne sont plus égaux»
Pour Sophie Joissains le fait d’apprendre que les Marseillais étaient informés dès hier de la décision du Conseil «est perturbant». «D’autant, poursuit-elle, que cette décision conforte l’hégémonie des grandes villes au détriment des autres et notamment, des communes agricoles ce qui peut étonner lorsque l’on sait que le monde agricole est à l’agonie. On est en train de faire disparaître les communes, on veut copier, maladroitement, les lands allemands, sans en avoir la culture et l’histoire». Elle ne cache pas son inquiétude : «D’un côté, on nous explique que les citoyens ne sont plus égaux, de l’autre, en commission des Lois, on propose de s’en prendre à l’égalité du temps de parole à la présidentielle pour le transformer en équité du temps de parole dont le CSA serait juge et partie. C’est, je le pense, représentatif de l’état de notre droit ». «La décision ne nous convient pas mais nous allons nous y plier, ce qui ne nous empêche pas de la commenter», avance Gérard Bramoullé. «Le monde démocratique, poursuit-il, se définit par un Homme une voix. Ici, il faut trois Pertuisiens pour un Marseillais. Et l’usine à gaz qui se construit va peser sur un problème majeur : l’emploi. On sait tous que le développement économique est lié à des locomotives, or le développement de l’aire métropolitaine vient du Pays d’Aix qui accueille les entreprises les plus importantes. Cette dynamique va être cassée par la métropole avec 70 millions de prélèvements supplémentaires. L’ensemble des EPCI envisageaient 800 millions d’investissements, lors des premières réunions que nous avons eu, on nous a dit de réduire de 200 millions». «On nous dit, enchaîne-t-il, qu’il faut la métropole pour des raisons éthiques, réduire la pauvreté des quartiers Nord. Alors, je suis allé voir ce qu’il en était sur Marseille, entre les quartiers Nord et Sud. Et bien le revenu moyen au Sud est plus élevé que celui du Pays d’Aix. Si solidarité il doit y avoir, elle doit d’abord commencer entre Marseillais».
Richard Mallié, alerte : «Nous sommes en colère mais la décision est prise. Aujourd’hui nous représentons 55 élus sur 240 ce qui est loin de faire une majorité. La mégapole est en route il faut être dans le sens de la marche». Jean-Claude Ferraud rappelle pour sa part : «Nous étions contre la métropole du temps de Sarkozy, nous sommes toujours contre. Les marseillais ont un très gros appétit, après tout pourquoi les en blâmer. C’est l’État qui a perdu la raison, c’est l’État qui ne soutient pas Marseille». Et d’affirmer que la métropole pose déjà des problèmes dans sa commune: «Nous avons besoin d’une gare routière, grâce à la CPA nous avons pu acquérir un terrain en fin d’année. Mais depuis nous n’avons pas pu faire valider l’achat et je ne suis pas sûr que monsieur Gaudin veuille nous aider».
Michel CAIRE