Publié le 8 avril 2016 à 1h30 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 13h45
Avant un débat apaisé sur les orientations budgétaires, la troisième plénière de la métropole Aix-Marseille-Provence a commencé comme il se doit par des tensions, un affrontement entre le PS marseillais et le président, Jean-Claude Gaudin, qui a conduit Yves Vidal, le maire de Grans, à s’élever contre «ces débats marseillo-marseillais». Alors que les premiers votes (électroniques), laissent apparaître que l’abstention est le premier groupe métropolitain -avec des résultats allant de 120 à 150 sur 240 -, soit, chaque fois, plus que le nombre de votes favorables… jusqu’à ce que Jean-Claude Gaudin annonce un bug et passe au vote à main levée.
Une plénière au cours de laquelle il a été question du nombre de membres nécessaires pour constituer une groupe, 20, ce qui a conduit le PS par la voix de Florence Masse de dénoncer un nombre trop élevé, tout comme le Front de Gauche … La métropole se met en place, l’accouchement n’est pas sans douleur.
Le rapporteur général du budget, Jean Montagnac, de présenter les orientations budgétaires, un document de transition qui entend «fixer une trajectoire vertueuse et permettre de se donner des marges de manœuvres». L’élu ne manque pas d’évoquer les contraintes fortes dans lequel ce document a été réalisé avant de saluer «la collaboration intense qui a prévalu». Pour Eugène Caselli, PS, si contrainte il y a, elle est la conséquence «du retard pris par la métropole pour mettre en place ses structures techniques, humaines et financières». Et d’évoquer les urgences auxquelles il s’agit de répondre : «Elles sont multiple en matière de transport, de développement économique, de grands projets structurants, de contraintes financières et sociales et devront s’inscrire dans uns stratégie globale et pluriannuelle pour l’ensemble du territoire lors de la construction du budget 2017».
«Les investissements publics n’ont pas vocation à se porter uniquement sur les ronds points, les stades ou les salles de spectacle»
Pour l’ancien président de MPM, donc, «le temps est venu pour que l’investissement public se consacre plus largement aux projets d’intérêt général à l’échelle de la métropole». «Bien sûr, poursuit-il, il ne s’agit pas de stopper les projets communaux, il s’agit de déplacer un peu le curseur comme c’est le cas à Lyon, à Lille ou Bordeaux et considérer que les investissements publics n’ont pas vocation à se porter uniquement sur les ronds-points, les stades ou les salles de spectacle, mais qu’ils doivent aussi pallier l’incurie des transports inter-urbains et servir une politique d’aménagement efficace des zones économiques ou commerciales, le port de Marseille-Fos, la rénovation urbaine, le maillage économique et l’attractivité de la métropole, à l’international». Considérant: «L’efficacité, la cohérence de l’action et l’effet de levier des financements publics peuvent et doivent être l’un des moteurs du développement local quitte à faire tomber quelques barrières et froisser quelques susceptibilités». Marie-Arlette Carlotti, PS, ajoute: «Nous devons mettre les bouchées doubles pour rattraper notre retard, pour construire un territoire métropolitain qui fait reculer la pauvreté et la précarité. Pour cela nous aurons le soutien actif de l’État qui apportera 84 millions d’euros». Et de se prononcer pour deux priorités, les transports et la construction de logements.
Stéphane Ravier, FN, entend affirmer sa différence, en jugeant la métropole comme «un monstre technocratique difficile à gouverner» dont la solvabilité «n’est pas garantie». Pour Marc Poggiale, PCF-Front de gauche: «La métropole, tout comme les autres collectivités, n’échappe pas au cadre imposé par les gouvernements successifs, celui d’une contraction budgétaire et fiscale signifiant un recul de plus en plus préoccupant de l’action publique pour répondre aux préoccupations des habitants, des usagers, des forces vives de nos 92 communes». Et déplore : «Les 400 millions d’investissements par an annoncés et non les 600 millions espérés par les budgets primitifs votés en décembre 2015 par les EPCI dissoutes».
«Il manque un rapport sur l’état de la dette»
Gérard Bramoullé, LR, Aix-en-Provence trouve, pour sa part, trois points positifs dans ce rapport : «Ce document reconnaît le travail accompli par les anciennes EPCI en s’appuyant sur les budgets qu’elles ont voté, c’est important. Deuxièmement il fait preuve de lucidité sur les trajectoires prévisionnelles. Dans deux exercices nous serons confrontés à des difficultés liées au montant de l’endettement. C’est le problème que nous devons résoudre. Troisième point positif, le pacte de gouvernance financier et budgétaire, le choix pour résoudre les difficultés ». Il regrette cependant l’absence d’un rapport sur l’état de la dette.
Yves Vidal d’insister: «Je ne suis ni un pro ni un anti métropole». Et à destination du président, il rappelle: «Vous avez été choisi pour résoudre la quadrature du cercle». Indique son désaccord avec Eugène Caselli: «C’est important les rond-points, les stades… c’est ce qui maintient le lien social. Après, il faut être conscient que ce territoire ne s’est pas construit autour d’une ville phare, c’est une difficulté qu’il faut résoudre mais pas au détriment de la proximité sachant que nous sommes un territoire pauvre. Car c’est bien de parler de Lyon, mais le taux d’endettement n’est pas le même. Il fallait un plan Marshall pour notre métropole. Il nous faut une aide exceptionnelle de l’État, sans cela cette métropole n’aura pas de débouchés».
«plus le seuil est bas, plus on assure une juste représentation des différentes sensibilités démocratiques »
Avant ce débat, la tonalité était tout autre, les tensions bien présentes, comme au plus beau jour des campagnes électorales. Ainsi, dans l’attente d’un règlement intérieur qui fixera le nombre de membres nécessaires pour constituer un groupe, il est nécessaire d’être 20 pour en constituer un. Trop pour Florence Masse qui avance: «Plus le seuil est bas, plus on assure une juste représentation des différentes sensibilités démocratiques en présence. Il serait démocratique de fixer ce seuil à 5% comme cela se fait dans bon nombre d’assemblées». Marc Poggiale jug, lui aussi, que le nombre de 20 est bien trop important, allant jusqu’à demander le retrait du dossier. Georges Cristiani, le président de l’Union des maires des Bouches-du-Rhône, après avoir annoncé être à la tête d’un groupe de 35 maires, considère : «Il ne faut pas verrouiller mais être dans une unité d’action. Si nous entrons dans une logique d’appareil cela va nous éloigner du réel. Il faut que nous puissions gérer ce territoire hors clivage pour faire face à l’enjeu qui nous est imposé par le gouvernement, celui d’une métropole imposée sans lui donner les moyens de vivre ». Jean-Claude Gaudin saisit la balle au bond pour lancer en direction du PS : « Droite/Gauche ce n’est plus à la mode comme le montre l’initiative d’un membre du gouvernement (la création par Emmanuel Macron du mouvement « En Marche ! » NDLR)». Puis, de s’adresser à son meilleur adversaire : «Patrick Mennucci vous avez les yeux rivés sur 2020. C’est la raison qui fait que vous avez empêché les maires de votre sensibilité de participer à la majorité métropolitaine». Le président Gaudin de mettre alors les premières orientations budgétaires au vote et, d’obtenir la majorité. Puis vient un nouvel affrontement avec le PS sur les membres des commissions. Le Maire de Grans de réagir : «Ce serait bien d’arrêter vos prises de bec entre Marseillais surtout que ceux qui sont aujourd’hui contre sont ceux qui ont voulu la Loi. Ils voulaient même l’élection du président de la métropole au suffrage universel direct ». Jean-Claude Gaudin acquiesce : «Je ne suis pour rien dans le fait qu’il y ait eu des exécutions capitales au sein de la gauche lors de la dernière plénière». Concernant la constitution d’un groupe de travail pour élaborer le pacte de gouvernance financier et fiscal de la métropole, Georges Cristiani souhaite que les maires soient plus présents. Hervé Fabre Aubrespy souhaite également une plus forte présence des maires, tout comme Roger Pellenc, le maire de Pertuis, ce qui pousse Jean-Claude Gaudin a proposé six postes de plus, un par conseil de territoire, choisi par ces derniers.
Michel CAIRE