Publié le 9 février 2021 à 17h33 - Dernière mise à jour le 31 octobre 2022 à 14h55
Le rendu du tribunal dministratif de Nice, suspendant l’arrêté de Christian Estrosi interdisant les locations saisonnières non essentielles pour la période du 6 au 21 février 2021, est un coup de canif dans le dispositif anti-covid «strict» mis en place par le maire niçois dans sa commune.
Si l’on se réfère à la législation, en vertu du code général des collectivités territoriales, le maire, y compris en période d’état d’urgence sanitaire, a autorité à prendre dans sa commune les mesures de police générale obligatoire pour le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Pourtant, il n’est pas autorisé à édicter, au titre de ce pouvoir, des mesures destinées à lutter contre la catastrophe sanitaire. A moins que des raisons impérieuses liées à des circonstances locales en rendent l’édiction indispensable et à condition de ne pas compromettre, la cohérence et l’efficacité de celles prises dans ce but par les autorités compétentes de l’État.
C’est clairement pour lutter contre la propagation du Coronavirus que Christian Estrosi avait, le 25 janvier 2021, pris la décision d’interdire purement et simplement les locations saisonnières à Nice du 6 au 21 février 2021. Pour cela, l’élu et son équipe s’étaient appuyés sur les chiffres alarmants de la situation épidémiologique dans les Alpes-Maritimes. Conscient des risques de prolifération à grande échelle, il concluait alors que l’affluence touristique du mois de février liée, notamment, aux vacances scolaires, était un facteur aggravant de la propagation de l’épidémie. D’où l’arrêté en question, qui pouvait paraître logique, même s’il était très restrictif.
Union des professionnels de la location touristique vent debout contre l’arrêté de Christian Estrosi
C’était sans compter sur l’Union des professionnels de la location touristique (ULPT), qui ne le voyait pas du même œil et qui n’ont pas hésité à saisir, en urgence, le juge des référés du tribunal administratif. De cette action en sont ressortis 5 points essentiels :
- La situation sanitaire dans les Alpes-Maritimes, pour préoccupante qu’elle soit, n’avait pas conduit le représentant de l’État dans le département à prendre des mesures supplémentaires d’interdiction de déplacement ou de limitation des locations saisonnières
- L’afflux massif de touristes invoqué en période hivernale n’était pas démontré, notamment suite au report de l’édition 2021 du Carnaval de Nice et de la restriction des voyages non essentiels à l’intérieur d’un même pays mais aussi d’un pays à l’autre
- L’arrêté contesté exonère les locations hôtelières de l’interdiction édictée, ce qui relève d’une rupture d’égalité entre les différents acteurs du tourisme, étant par
- L’UPLT a prévu une charte sanitaire stricte et un guide pratique de la gestion de la Covid-19, appliqués par l’ensemble de ses adhérents et, qu’au demeurant, s’agissant des locations saisonnières, les contacts sont de facto limités en l’absence de lieux de réception et de restauration.
Une suspension immédiate de l’interdiction du maire
Ainsi, il n’a pas été démontré en quoi les mesures contestées, qui comportent des exceptions jugées durement compréhensibles par les acteurs économiques locaux et qui ont des incidences dans de nombreux domaines autres que sanitaires, seraient actuellement indispensables, alors que la responsabilisation civique de citoyens, suivant librement les recommandations sanitaires qui leur paraissent justifiées et légitimes, est prônée actuellement au niveau national.
En se basant sur ces données clés, le magistrat a concédé qu’il s’agissait alors d’une atteinte immédiate au droit pour les citoyens d’user, de jouir et de disposer de l’intégralité de leurs biens et à la liberté du commerce et de l’industrie des professionnels dont l’activité porte sur la location saisonnière. Il a immédiatement pris la décision de suspendre l’arrêté de Christian Estrosi. Un coup dur pour le dispositif du maire de Nice ? Peut-être pas à ce point, mais en tout cas, cela complique quelque peu les choses alors que de nombreux Niçois soutenaient une initiative qu’ils pensaient logique.
Mathieu Seller