Publié le 26 juillet 2016 à 8h43 - Dernière mise à jour le 28 octobre 2022 à 15h32
Vienne, décembre 1791. Wolfgang Amadeus Mozart vient de mourir. Constance, sa veuve, doit faire front. Seule et désargentée, accablée de chagrin elle doit répondre à une question urgente : «Mozart disparu, quel disciple du grand compositeur, capable de terminer le fameux Requiem doit être choisi pour exécuter cette tâche immense ?» Elle reçoit alors un certain Franz-Xavier Süssmayr qui semble avoir les épaules assez larges pour y parvenir. Et puis elle l’aime beaucoup…. et le jeune homme n’est pas insensible non plus à sa beauté et à son charisme. D’ailleurs ils ont eu sans doute une aventure sentimentale du vivant même de Mozart. Mais la discussion entre les deux prend un tour professionnel où se mêleront ego artistique, ressentiments, passion amoureuse, évocation du passé, et défense du patrimoine musical du génie disparu, rien ne sera simple à décider….
Sur un canevas historique précis, Alain Teulié, qui a beaucoup lu les essais et les biographies consacrés à Mozart, ainsi que la correspondance s’y rattachant, signe une pièce absolument fascinante, drôle parfois, serti d’un humour décalé, et d’une élégance de style tranchant avec la vision quelque peu convenue d’un jeune Wolfgang à la tenue débraillée et au verbe grossier. Insistant sur les silences et les non-dits entre les deux personnages la mise en scène de Raphaëlle Cambray n’insiste jamais suggère au contraire, et laisse aux deux acteurs toute latitude nécessaire pour faire triompher une vérité qui se dérobe sans cesse. Et quels comédiens ! Delphine Depardieu dans le rôle de Constance est absolument divine de beauté, de profondeur douloureuse, d’espièglerie également, et d’intelligence de vie. A ses côtés pour incarner Süssmayr, compositeur dont on sait qu’il achèvera bien le Requiem de Mozart avant de mourir lui aussi sensiblement au même âge que son maître, Guillaume Marquet réussit à camper une sorte de héros pré-romantique à la Musset, (sans les larmes amères provoquées par George Sand) et nous émeut à chaque minute. Décor aussi élégant que les deux héros, lumières soignées, costumes d’époque, jeu et texte lumineux, musque additionnelle de Mozart où l’on entend l’Aixoise Hélène Grimaud interpréter un concerto, tout concourt à faire du «Dernier baiser de Mozart» un grand moment de théâtre classique, qui est un éloge de la musique, de l’écriture racée, et de l’acteur dans tous ses états. Remarquable !
Jean-Rémi BARLAND
« Le dernier baiser de Mozart » d’Alain Teulié. Avec Delphine Depardieu et Guillaume Marquet. Au Théâtre actuel d’Avignon dans le cadre du Festival Off à 19h05 jusqu’au 30 juillet. 80 rue Guillaume Puy. Tarifs : 20 € ; Abonnés : 14 € ; Réservations et infos au 04 90 82 04 02. Texte de la pièce édité aux éditions Michel de Maule.