Publié le 14 octobre 2021 à 20h22 - Dernière mise à jour le 1 novembre 2022 à 16h46
La saison lyrique s’est ouverte mardi soir à l’Opéra avec le «Guillaume Tell» de Rossini. Une production à deux facettes : lumineuse musicalement et vocalement, difficilement compréhensible scéniquement.
Nous l’avions annoncé il y a quelques semaines, c’est en configuration covid que l’opéra a ouvert ses portes avec un orchestre implanté au parterre qui, de fait, s’est vu amputer de six rangs de fauteuils. Un contexte particulier, donc, plutôt bien maîtrisé par les artisans de cette production marquée par deux prises de rôles, celles d’Angélique Boudeville, qui chantait Mathilde pour la première fois de sa carrière, et celle d’Alexandre Duhamel dans le rôle titre. Voix ronde, précise et puissante, la soprano s’est imposée sans problème et a donné toute sa plénitude à son rôle. Une vraie démonstration. Pour le baryton, le départ fut un peu plus difficile avant de revêtir avec aisance le costume de Guillaume Tell en donnant à son personnage sa puissance vocale avec une belle ligne de chant et sa présence scénique imposante et sensible.
Une distribution homogène
A leurs côtés, le ténor Enea Scala, Arnold, s’est taillé un beau succès en imposant son jeu avec passion et sa voix avec une idéale projection. Ses aigus ont fait frissonner le public et ses duos d’amour avec Mathilde furent somptueux. Dans le rôle travesti de Jemmy, le fils Tell, Jennifer Courcier a parfaitement joué l’adolescent rebelle et la mezzo Annunziata Vestri fut une excellente Hedwige. C’est à Cyril Rovery qu’incombait la charge d’incarner le tyran Gessler. Emacié, inquiétant à souhait, il a parfaitement tenu ce rôle tout en livrant sa partie vocale avec noirceur et précision. Thomas Dear, Melchthal, Camille Tresmontant, Rodolphe, Patrick Bolleire, Walter Furst, Jean-Marie delaps, Leuthold et Carlos Natale, un pêcheur, complétant idéalement une distribution homogène.
Un maestro exceptionnel
Grande satisfaction, aussi, avec la présence d’un jeune maestro pétrit de talent, Michele Spotti qui a su parfaitement maîtriser une situation qui pouvait être délicate, en livrant un travail tout de finesse et de sensibilité pour mettre en valeur cette partition exceptionnelle de Rossini, en tenant compte des contraintes liées à l’emplacement des instrumentistes et en établissant un bel équilibre entre l’orchestre, au demeurant superbe, et les solistes. De la belle ouvrage qu’il convient de souligner ici. Tout comme l’excellence de la prestation du chœur placé en retrait mais bien présent vocalement même en nombre réduit.
Une mise en scène contestée
Moins apprécié par le public qui l’a fait savoir au moment des saluts, le travail du metteur en scène Louis Désiré, ne nous a pas convaincus. Si l’intemporalité des costumes signés Diego Mèndez-Casariego n’est pas déplaisante, paysans endimanchés et oppresseurs sous cache-poussières aux notes « nazillardes », le dispositif scénique fait de madriers et autres cubes en bois est difficilement compatible avec la compréhension de l’action et va parfois même à contresens de cette dernière. Perturbant pour le public mais aussi pour les interprètes manquant parfois d’aisance. Et même la pantomime qui accompagnait l’ouverture excellemment interprétée par l’orchestre, en a laissé plus d’un de glace… Normal au pied des montagnes suisses enneigées.
Michel EGEA
Autres représentations les 15 et 20 octobre à 19 heures et le 17 octobre à 14h30. Plus d’info et réservations: opera.marseille.fr