Publié le 10 février 2017 à 22h30 - Dernière mise à jour le 28 octobre 2022 à 15h52
C’est un nouveau rôle, celui du vieux moine Pimène, que Nicolas Courjal accroche à son répertoire en ce mois de février à Marseille, du 14 au 21. Ainsi, après quelques mois passés dans l’univers baroque, celui qui est aujourd’hui considéré comme l’une des plus belles voix de basse en France retrouve avec «Boris Godounov», l’opéra de Moussorgski, la musique du 19e siècle dans l’interprétation de laquelle il excelle. Il retrouve aussi Marseille pour plusieurs semaines puisque Maurice Xiberras, le directeur général de la maison lyrique, lui a confié un récital au Foyer le 11 mars, le rôle de Capelio dans «I Capuleti e i Montecchi» de Bellini du 26 mars au 4 avril et le rôle de Philippe II de « Don Carlo » de Verdi du 8 au 17 juin. De quoi avoir des envies d’acheter un cabanon au vallon des Auffes… Rencontre.
Destimed : C’est un vrai printemps marseillais qui s’ouvre pour vous….
Nicolas Coujal: C’est vrai et j’en suis ravi. Le Breton que je suis apprécie cette ville ouverte sur la Méditerranée. Puis à l’Opéra, je suis un peu comme à la maison depuis 2010. Il y a une belle ambiance, c’est un endroit où l’on aime les chanteurs et où le public est redoutable, mais connaisseur. Je me sens ici comme si j’étais en troupe.
Revenons, si vous le voulez bien, sur ces six ou huit derniers mois qui furent très baroques. Votre répertoire, c’est le 19e, mais que diable êtes vous allé faire chez Rameau ?
En fait, c’est Raphaël Pichon qui m’a proposé d’être Abramane dans le «Zoroastre» qu’il créait l’été dernier, au festival d’Aix-en-Provence notamment, et qui allait ensuite tourner. Je me suis laissé porter par sa confiance et j’ai accepté.
C’était un voyage en terre inconnue pour vous…
Tout à fait. C’est un univers que, stylistiquement, je ne connaissais pas du tout. Le concept c’était de chanter comme je suis, ce rôle sombre et long. J’ai trouvé des connexions entre le baroque et le classique, entre le Méphisto de Berlioz et Rameau, j’ai beaucoup travaillé sur la prosodie. Au final si on me propose d’en refaire un, j’y vais.
Vos prestations ont été diversement appréciées par la critique; comment l’avez vous vécu ?
Je suis assez détaché par rapport à la critique. Je sais quel est mon travail et c’est ça le plus important. Après, chacun entend avec ses oreilles… Pour moi, l’intérêt d’un rôle, c’est d’y trouver quelque chose à dire. De mener le personnage d’un bout à l’autre. Et même un méchant comme Abramane a des choses à dire ; il est capable d’exprimer des sentiments. Il eut été dommage d’en faire un personnage monolithique pour demeurer un intégriste de l’expression baroque. Puis aussi, et surtout, ce fut une expérience humaine enrichissante menée avec Raphaël Pichon et son ensemble Pygmalion ; une belle aventure. J’ai aussi beaucoup apprécié d’être au casting de l’«Orfeo» de Monteverdi mis en scène par Robert Carsen l’automne dernier à Lausanne…
Retour au 19e siècle avec ce «Boris Godounov» de Moussorgski. Vous y prenez le rôle de Pimène. Après un mois de répétition, quel regard portez-vous sur ce personnage ?
A chanter, c’est du baume pour la voix. C’est de la basse chantante et ça me convient parfaitement. Pimène c’est grave et lumineux à la fois, c’est un peu le narrateur et il y a chez lui un côté un peu ambiguë. En fait, je connaissais deux airs de Boris et je découvre une musique tout juste magnifique. J’ai vraiment hâte d’être au soir de la première.
Lorsque vous vous tournez vers l’avenir, que voyez vous ?
De nombreuses prises de rôles en 2017 et pas des moindres. J’ai 40 ans aujourd’hui et pendant 20 ans j’ai travaillé des seconds rôles. J’ai la chance que des directeurs d’Opéras me proposent désormais de prendre des tournants avec des rôles conséquents, je ne vais pas m’en priver… Aujourd’hui mon emploi du temps est complet pendant trois ans. Alors ça donne de la confiance et ça multiplie l’envie de travailler. Je suis heureux…
Propos recueillis par Michel EGEA
Pratique : «Boris Goudounov », opéra en 7 tableaux de Modeste Moussorgski, livret d’après la pièce d’Alexandre Pouchkine et l’Histoire de l’État russe de Nikolaï Mikhaïlovitch Karamzin, basé sur la version de 1869, révision Michael Rot. Direction musicale : Paolo Arrivabeni ; Mise en scène / Décors : Petrika Ionesco ; Lumières Patrick Méeüs. Avec Ludivine Gombert (Xénia), Caroline Meng (Fiodor), Marie-Ange Todorovitch (La Nourrice / L’Hôtesse) ; Alexey Tikhomirov (Boris), Nicolas Courjal (Pimène), Jean-Pierre Furlan (Gregori/Dimitri), Lucas Lombardo (Chouisky), Wenwei Zang (Varlaam), Christophe Berry (L’Innocent), Ventseslav Anastasov (Andrei Tchelkalov), Marc Larcher (Missail) Julien Véronèse (Nikitch/l’Officier de police), Jean-Marie Delpas (Mityukha). Orchestre et Chœur de l’Opéra de Marseille, Maîtrise des Bouches-du-Rhône.
Représentations les 14, 16 et 21 février à 20 heures, le 19 février à 14h30. Réservations : 04 91 55 11 10 ou 04 91 55 20 43. Plus d’info: opera.marseille.fr/