Publié le 18 juillet 2013 à 5h00 - Dernière mise à jour le 27 octobre 2022 à 15h58
Après 13 années d’existence, le pôle de compétitivité Optitec fédère 125 entreprises du secteur de la photonique du Sud-Est de la France. Implantées sur les régions Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA) et Languedoc-Roussillon, elles ambitionnent de créer 14 000 emplois d’ici 2022 comme elles l’ont révélé lors d’une table ronde au Palais de la Bourse à Marseille.
« On vit un moment clé dans l’économie, la fin d’un mythe, celui du tertiaire dominant tout alors que la fabrication, la réalisation industrielle est essentielle » : ces mots de Bernard Morel (PS), vice-président de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA), résument l’enthousiasme qui a dominé, le 19 juin au Palais de la Bourse à Marseille, à l’occasion d’une table ronde sur le thème « Les leviers de croissance des PME du secteur photonique du Sud-Est de la France », organisée par le pôle Optitec. Car l’industrie est plus que jamais porteuse d’avenir en région PACA, pourtant bien souvent davantage associée au tourisme. « Il faut donner une nouvelle impulsion au développement économique. Le lien entre innovation, internationalisation et attractivité sera le centre de nos politiques dans les années à venir », promet le vice-président du conseil régional en charge de l’Emploi, du développement Economique, de la Recherche, de l’Enseignement Supérieur et de l’Innovation. Et l’élu régional de s’inscrire dans la lignée des engagements, relayés par Les Echos, du ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, qui, la veille, avait promis qu’en matière d’aides aux entreprises un milliard d’euros serait désormais fléché vers quatre priorités : investissement, innovation, industrie et international.
De la théorie à la pratique, il n’y a qu’un pas qui a été aisément franchi à travers le retour d’expériences du pôle de compétitivité Optitec, spécialisé dans la photonique, secteur qui consiste à utiliser la lumière à des fins industrielles et scientifiques. Identifiée comme l’une des 6 technologies clés (« Key Enabling Technologies ») par la Commission Européenne, la photonique touche ainsi de multiples secteurs à forts potentiels de développement : la santé (imagerie médicale, ophtalmologie…), le développement durable (éclairage Leds…), l’environnement (tri des déchets…), les transports, la sécurité civile ou encore l’aéronautique. Créé en 2000, porté par l’association Pôle optique et photonique Sud (POPsud), Optitec est, après 13 années d’existence, un cluster photonique reconnu, moteur de la filière dans le sud-est de la France puisqu’il fédère 125 entreprises, implantées sur les régions PACA et Languedoc-Roussillon, représentant un chiffre d’affaires de 1,3 Md€ et 10 000 salariés. « Le pôle a une triple mission : contribuer à la croissance des TPE/PME, impulser une dynamique industrielle régionale afin de transformer la R&D (Recherche et Développement) en création de valeur et promouvoir la photonique, explique Katia Mirochnitchenko, directrice du Pôle de compétitivité Optitec. 87% des membres sont des TPE/PME avec un rôle d’entreprises innovantes puisque 25% du chiffre d’affaires est dédié à l’innovation, alors que 45% du chiffre d’affaires est réalisé à l’international. »
« Le taux de croissance de l’emploi est estimé en moyenne à 158% »
Regroupant des PME très innovantes, des grands groupes intégrateurs et des partenaires universitaires de premier plan, le pôle a impulsé une forte dynamique de projets collaboratifs de R&D et le développement de nouveaux services et produits innovants. « L’une des ambitions d’Optitec est d’accompagner ses membres dans la transformation de la R&D en débouchés économiques et industriels », rappelle Jean-Claude Noack, président du pôle de compétitivité. En six ans, Optitec a ainsi labellisé plus de 170 projets collaboratifs pour un montant de 465 M€ et 100 M€ de subventions. « Soixante-cinq start-ups ont été créées en 10 ans. Il faut les faire croitre », insiste Katia Mirochnitchenko.
Car le pôle de compétitivité ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Selon une étude, financée par la Région PACA, portant sur un panel de 22 entreprises du pôle et rendue publique à l’occasion de cette table ronde, les entreprises membres d’Optitec tablent en effet sur une croissance de leur activité de 50% en moyenne à horizon 5 ans. Ce qui générerait la création de 14 000 emplois d’ici 2022, pour atteindre 24 000 postes au total dans les 200 entreprises de la filière photonique du Sud-Est de la France. Malgré un contexte économique défavorable, Optitec affiche ainsi la dynamique de ses entreprises dans un secteur en pleine expansion. « Le taux de croissance de l’emploi est estimé en moyenne à 158% », souligne la directrice d’Optitec.
Une perspective d’autant plus remarquable que la création d’emplois est l’objectif majeur du pôle qui nourrit l’ambition de passer de 14 à 20% de l’activité de la filière industrielle nationale. Dans ce but, plus d’une centaine de formations initiales et continues en lien avec la photonique ont cours dans le Sud-Est. Une convention de partenariat a également été signée, lors de cette table ronde du 19 juin, entre Optitec et l’Association pour l’emploi des cadres (Apec) afin d’aider les PME à recruter et à fidéliser des compétences. Le pôle de compétitivité offre également sur son site Internet (www.popsud.org) une bourse de l’emploi ciblée sur les métiers de la photonique.
« Il faut élargir les opportunités des entreprises, renforcer leur vision européenne »
Un développement des entreprises d’Optitec que la Région PACA a bien l’intention d’accompagner. « De petites entreprises de 10-12 personnes sont aujourd’hui indispensables à des monstres tels que Boeing. Cela suppose pour notre pôle une gouvernance modifiée en associant encore plus les entreprises. Souvent on passe de la recherche fondamentale à la recherche appliquée : il faut que la recherche appliquée soit aussi en demande de la recherche fondamentale. Il faut également avoir encore plus de relations avec l’université pour qu’elle puisse répondre aux besoins de l’économie. Il y a à l’Est de la région, sur Nice, un potentiel de recherche inestimable », souligne Bernard Morel. Saluant « un pôle qui avance en changeant, où la place des entreprises est de plus en plus essentielle », le vice-président du conseil régional poursuit : « Les contraintes budgétaires existent, il faudra faire des choix, et les contraintes européennes existent, il faudra aller chercher le FEDER (NDLR : Fonds européen de développement régional) ce qui ne sera pas forcément facile. Il va falloir sa battre mais vous avez la confiance de la Région. »
Même soutien affiché du côté de l’Etat. « Si le conseil régional est le chef de file de la stratégie économique régionale, l’Etat accompagne le développement et les pôles de compétitivité sont son premier grand vecteur d’intervention. Les pôles et les PRIDES sont le moyen d’accéder à l’écosystème régional composé à 95% de TPE/PME », précise Gilles Barsacq, secrétaire général pour les Affaires Régionales à la préfecture de la Région PACA à Marseille. Dans cette optique, le représentant de l’Etat se félicite que la stratégie affichée dans le contrat de performance d’Optitec soit « conforme aux objectifs du gouvernement ». « Il faut renforcer la compétitivité des entreprises sur le territoire par l’innovation. Pour encourager la R&D, les pôles devront renforcer leur rôle sur l’accès au financement privé, l’internationalisation, l’accompagnement des PME et l’anticipation de l’évolution des compétences. Il faut élargir les opportunités des entreprises, renforcer leur vision européenne », plaide le secrétaire général pour les Affaire Régionales.
Jugeant que « la nouvelle structure de gouvernance » d’Optitec « démontre cette volonté », Gilles Barsacq rappelle également que le gouvernement a mis en place « plus d’une cinquantaine de mesures en faveur des entreprises », du crédit impôt recherche, « une des plus fondamentales », aux emplois d’avenir, où PACA est « une des rares régions à les avoir ouverts aux emplois marchands ». « Il faut profiter de cet avantage comparatif », insiste-t-il.
L’attractivité du Sud-Est identifié comme un levier de croissance
L’étude a par ailleurs permis d’identifier les freins et les leviers de croissance observés auprès des PME d’Optitec. D’une part, deux grands obstacles se dégagent : le problème de la réorientation des compétences vers la stratégie commerciale (marketing, vente…) et le risque de dispersion quand la diversification de l’entreprise est « subie ».
A contrario, l’étude a mis en lumière cinq facteurs clés de croissance. Tout d’abord, l’investissement en R&D où, en tant qu’expert de la filière, Optitec fournit à ses PME un accès à un potentiel scientifique et technologique de 1er rang (réseau académique régional et international), et une ingénierie de montage de projet, sur les projets de R&D mais aussi des plates-formes mutualisées. « Nerf de la guerre », le financement des entreprises apparaît aussi comme un facteur de leur développement. En moyenne, les entreprises d’Optitec ont pu lever 4M€ de fonds dans leurs cinq premières années de vie. L’un des objectifs du pôle est désormais d’aider les PME à accéder aux nouveaux financements européens du programme « Horizon 2020 ».
L’ouverture à de nouveaux marchés, en diversifiant son activité, est également un levier de croissance essentiel pour la survie des entreprises. Parmi ces marchés porteurs, quatre « Domaines d’activités stratégiques » sont considérés comme prioritaires par Optitec : « Green photonique », « Photonique pour les procédés industriels et agricoles », « Sécurité & surveillance » et « Instrumentalisation scientifique et médicale ». Le développement à l’international est un autre facteur de croissance des entreprises. L’un des objectifs clés du pôle de compétitivité est ainsi de renforcer le positionnement de ses entreprises à l’international, notamment en constituant un réseau d’experts internationaux sur des zones à fort potentiel (Etats-Unis, Russie, Asie, Inde et Israël) et en activant des financements pour de projets internationaux.
Enfin, l’attractivité du Sud-Est de la France est aussi un des leviers de croissance des PME d’Optitec. Elles bénéficient notamment de la présence d’un pôle scientifique et académique de 1er rang : 25% de la R&D nationale, 2 000 chercheurs, des grands projets scientifiques internationaux (Iter, ELT, Virgo, Antares…) ou encore des lieux d’accueil comme l’Hôtel Technoptic. Autant d’atouts qui contribuent à l’implantation de nouvelles entreprises sur le territoire, en lien avec les agences de développement économiques régionales.
Serge PAYRAU