Publié le 28 février 2015 à 20h52 - Dernière mise à jour le 27 octobre 2022 à 18h41
A l’enterrement d’Allain Leprest en août 2011, le parolier Claude Lemesle a salué l’extraordinaire talent d’écriture de ce funambule, artiste, et exceptionnel poète dont il salua en ami l’apport de ses textes au patrimoine de la chanson française. Chanté par les plus grands, repris par des artistes aussi différents que Michel Fugain, Yves Jamait, Bruno Putzulu, Jean-Louis Foulquier ou Anne Sylvestre -l’interprétation qu’elle fit de « Sarment» est absolument bouleversante-, Allain Leprest a laissé des textes qui n’ont jamais été enregistrés et que l’on découvre au fur et à mesure. Parmi ceux-là Jean Guidoni a sélectionné douze titres tous mis en musique par Romain Didier (ce dernier fut celui qui a le mieux habillé de notes les paroles des chansons de Leprest) et les a gravés sur un CD intitulé «Paris-Milan» qui est sorti chez Tacet/L’Autre Distribution. Un album d’une grande intensité dont l’idée naquit lors d’un spectacle intitulé «Où vont les chevaux quand ils dorment ?». Jean Guidoni revient sur ce «Paris-Milan» qui lui tient tant à cœur et pour lequel il s’est totalement investi. Entretien.
Destimed: Comment est né cet album ?
Jean Guidoni: Après le spectacle hommage «Où vont les chevaux quand ils dorment?», avec lequel nous avons tourné partout en France, Didier Pascalis qui fut le dernier producteur d’Allain m’a proposé d’enregistrer des textes qu’il possédait avec Romain Didier. J’ai choisi ceux qui correspondaient à mon univers, ceux qu’Allain aurait pu m’écrire. Comme ce «Paris-Milan» où l’on parle de remords, de pendules qui ne servent à rien, du temps qui passe. Une chanson qui me bouleverse au point d’avoir donné son titre à l’album.
Comment définiriez-vous Allain Leprest ?
Je dirais d’abord que c’est un auteur de chansons qui côtoie la poésie. Un artiste pour qui «les arbres sont des réverbères» et qui possédait des formules éblouissantes comme «Sourire c’est l’archipel de pleurer» ou «il pleut sur la mer et ça ne sert à rien». Je trouve que ses mots ne sont pas sans rappeler ceux de Prévert. Plus qu’un auteur c’est un écrivain. Et, j’ajouterai en second lieu c’est un créateur capable de faire surgir des images en peu de mots, dans des textes à tiroirs qui jouent sur le double sens des phrases.
Quelle est la philosophie de l’album?
«Paris-Milan» c’est un voyage dans les textes d’Allain entrepris avec modestie. Tout part de l’enfance ou de son regard enfantin comme l’atteste cette chanson «Dans le jardin de Gagarine» où il évoque ses souvenirs de gamin et d’adolescent au temps où l’on vendait sur les marchés l’Humanité dimanche. Un album où l’on raconte une histoire sur la condition humaine, sans trémolos ni grandiloquence. Une histoire à hauteur d’homme que je développe en m’appropriant les textes comme lui aurait pu les travailler.
Comment s’est organisé le travail avec Romain Didier, le compositeur des douze chansons ?
Formidablement bien ! J’avais envie de travailler avec Romain depuis très longtemps sur tout un album. Ce «Paris-Milan» nous en a donné l’occasion. Il est un musicien exceptionnel, un pianiste virtuose, très à l’écoute. On se dit en écoutant ses musiques que nous ne pouvons en imaginer d’autres pour mettre en lumière les mots magiques d’Allain. Et je suis du coup très heureux du résultat final. Comblé même.
Propos recueillis par Jean-Rémi BARLAND
« Paris-Milan » par Jean Guidoni. 12 textes d’Allain Leprest mis en musique par Romain Didier. CD Tacet/L’autre distribution.