Télétravail, management à distance, digitalisation : l’explosion des télétravailleurs est-elle un atout ou un risque de plus pour la santé ?

Publié le 8 juin 2018 à  17h16 - Dernière mise à  jour le 28 octobre 2022 à  18h49

On estime qu’en moyenne les Français en activité consacrent 30% de leur temps chaque jour à lire et répondre à leurs courriers électroniques. Appels téléphoniques qui se succèdent, réunions pour un oui ou un non, le toujours plus au bureau, dans l’entreprise, est désormais à la Une des préoccupations des acteurs de santé, médecins du travail, syndicats, et pouvoirs publics.

Le 35e congrés de médecine et santé au travail s'est tenu au Parc Chanot de Marseille et a réuni quelque 3 500 congressistes (Photo Robert Poulain)
Le 35e congrés de médecine et santé au travail s’est tenu au Parc Chanot de Marseille et a réuni quelque 3 500 congressistes (Photo Robert Poulain)
Face à cette avalanche de surplus d’activité, le télétravail pratiqué à son domicile, ne serait-ce qu’une fois par semaine, a été accueilli comme une potion salvatrice. On estime aujourd’hui entre 16 à 18/100 le nombre de salariés pratiquant régulièrement le télétravail. Un chiffre qui varie selon la définition que l’on en fait : il peut s’agir, soit d’un travail itinérant, ou exigeant une grande mobilité, ou du télétravail au sens strict du terme, défini et cadré par un accord d’entreprise. Doit être pris en compte également le télétravail indépendant, lui aussi en forte progression. Il est donc difficile d’avoir une estimation précise. Les dernières ordonnances sur le Code du travail (septembre 2017) ont le mérite d’avoir clarifié un certain nombre de situations, notamment pour ce qui relève du télétravail occasionnel, seul le télétravail régulier était intégré dans le contrat de travail. Aujourd’hui, l’employeur qui refuse des journées de télétravail à ses employés doit justifier son refus. Quant au télétravail occasionnel, il revient aux responsables des équipes de s’adapter. Et d’en apprécier aussi les bons côtés : pendant les mois de grèves des transports et d’intempéries qui ont limité les déplacements, de nombreux salariés ont fait jouer cet atout : continuer à travailler à domicile. Un peu, beaucoup, et finalement trop pour certains…

Du toujours plus au… Burn-Out

On a d’abord dit que le télétravail était un moyen de se protéger du Burn-Out. Peut-être. Mais le contraire est vrai aussi chez les « addicts » au télétravail. Capables de rester des heures devant leur ordi, ils travaillent le soir, le week-end, pendant leurs vacances, au début juste pour rester informés – être réactif est une valeur sûre dans les entreprises – puis la machine s’emballe, les nuits sont courtes, agitées, le stress et les insomnies épuisent l’organisme, ronge la vie privée. La phrase qui revient le plus souvent est : «Je n’arrivais plus à faire la coupure entre travail et vie de famille». Selon une étude réalisée dans 15 pays de l’Union européenne le Burn-Out toucherait davantage les travailleurs « très mobiles », sans cesse en déplacements, accros à tous les moyens de communications (Ordi, tablettes, Smartphones) pour rester «connecté» à leur boulot. Le télétravail n’est donc pas une solution miracle, mais employé à petites doses, un à deux jours par semaine selon les entreprises, il semblerait, d’après cette enquête, apporter un meilleur équilibre dans l’équation travail/famille. Affaire à suivre…

Mal au cou, mal au dos, mal partout !

Pas moins de 30 millions de journées de travail perdues à cause de la lombalgie ! C’est une des pathologies les plus fréquentes chez l’homme comme la femme qui a fait l’objet de plusieurs interventions lors de ce congrès élaboré dans le sillage réglementaire de la Loi Travail et du décret de 2016 qui modifie l’organisation de la médecine du travail. Ont été ainsi évoquées des pathologies d’hyper-sollicitations-périarticulaires dans différentes situations et emplois, allant de la stratégie de manutention dans les soutes d’avions au fuselage étroit (ce qui complique encore la tâche des équipes) aux troubles constatés chez les métiers de la grande distribution.
Autre grand thème abordé : les sciences de gestion, «l’art» du management qui englobe les risques encourus pour la santé. On en retient que si des progrès incontestables ont été faits, on est encore loin de la perfection ! Le domaine de l’entreprise reste un territoire très surveillé, n’y pénètre pas tout le monde… Sollicitées par les très grandes entreprises, des agences spécialisées dans «le bien-être au travail» font des merveilles, des aménagements futuristes tendance américaine, on décloisonne l’espace, c’est la création de sites de rencontres, d’échanges, plus de bureaux attribués, chacun se pose avec son ordi portable où il veut, le coworking est de mise et on cultive l’adage selon lequel «une rencontre devant la machine à café est plus efficace qu’une réunion !» La réalité au quotidien est autre. Spécialisée dans les projets d’amélioration des organisations de travail, une participante à ce congrès évoque les coups de freins qui lui sont souvent donnés : «Ce n’est pas le travail qui est responsable, ce sont les individus qui sont fragiles». Point à la ligne !

Le dur métier des stylistes ongulaires

Alors que les boutiques des stylistes ongulaires se multiplient, la sonnette d’alarme a été tirée pour que leurs jeunes femmes salariées aient pleinement connaissance de la toxicité des produits qu’elles manipulent et respirent à longueur de journée. Absence d’un système d’aspiration fréquent, utilisation de produits connus pour être cancérogènes-mutagènes-reprotoxiques, autant dire qu’elles mettent leur santé à rude épreuve sachant aussi que les repas sont pris au poste de travail dans un salon sur deux sur les 22 salons visités par les agents de L’Agence Nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail. Une campagne de sensibilisation des stylites ongulaires devrait améliorer cette situation. Deux cas de dermatoses professionnelles ont déjà été enregistrés.
Christine LETELLIER

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