Publié le 3 février 2017 à 23h56 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 13h45
Christian Estrosi, Président de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, a ouvert ce jeudi 2 février, les Assises Régionales des Transports, à l’Hôtel de Région, en compagnie de Philippe Tabarot, vice-président des Transports, de l’Intermodalité et des Déplacements et en présence de Maxime Tommasini, Président de la Commission Transports, Infrastructures, Aménagement du territoire, et Ports, Louis Nègre, sénateur-maire de Cagnes-sur-Mer, Président du Groupement des autorités responsables de transport (GART), Caroline Pozmentier-Sportich vice-présidente en charge de la sécurité et de Stéphane Bouillon, Préfet de Région. Plus de 400 personnes ont participé à cette réunion «préparée depuis 3 mois avec les comités de ligne. Le dialogue s’est ensuite poursuivi avec les associations d’usagers et les autorités organisatrices de Transports», soulignera Philippe Tabarot.
Christian Estrosi précisera: «Aujourd’hui, et c’est une première en France, nous nous réunissons pour vous donner la parole. Vous les usagers quotidiens de nos transports régionaux, les associations d’usagers, les élus locaux, les professionnels du rail, les experts de la mobilité, sans oublier les organisations syndicales qui ont préféré le dialogue et la réforme à la contestation et l’immobilisme». Avant de prévenir: «Je vais être très clair, je ne laisserai personne, absolument personne, voler ce dialogue apaisé que je souhaite instaurer avec vous face à une SNCF qui, visiblement, refuse de vous entendre».
93% des habitants de la Région approuvent ainsi notre volonté de réorganiser le service de transports
Le propos est d’autant plus fort qu’il s’appuie sur enquête d’opinion avec l’institut CSA sur les Transports et les mobilités en Paca. «Nous allons la rendre publique. Mais d’ores et déjà, et sans surprise, il en ressort que les habitants de Paca sont mécontents de l’état de service actuel et sont très favorables aux réformes que l’on souhaite mener. 93% d’entre eux approuvent ainsi notre volonté de réorganiser le service de transports. C’est ce que l’on appelle un plébiscite à ce niveau-là». Et toujours dans le cadre de cette enquête, il évoque la mise en concurrence de la SNCF, affirmant : «certains s’y opposent par pure posture idéologique. Oui mais voilà, il se trouve que les habitants de la région ne sont pas des idéologues eux. Moi non plus puisque j’ai même évoqué la possibilité d’une gestion en régie. Il faudra donc que nos adversaires se montrent plus imaginatifs pour les procès en ultra-libéralisme.» Indiquant qu’en termes de concurrence libérale «j’ai vu pire que la gestion en régie». Observant que sans idéologie, «66% des habitants de la région approuvent notre proposition. Il en est de même pour notre proposition de substituer des cars aux trains. 6 habitants sur 10 sont prêts à privilégier le car au train si leur niveau de service montait en gamme. Ce sont 4 lignes pour lesquelles nous avons lancé des études (Avignon-Orange, Breil-Tende, Aix-Pertuis et Gap-Briançon à certaines heures de la journée)». S’adressant aux personnes présentes, il avance: «Je souhaite que vous nous fassiez part de vos recommandations et retours du terrain à ce sujet. Cette adhésion mesurée par le sondage, elle se retrouve dans la mobilisation qui fait suite à la pétition que j’ai lancée la semaine dernière avec déjà plus de 1 000 signataires».
Christian Estrosi tient également à rappeler que pendant les élections régionales, «j’avais pris deux engagements forts. Non seulement nous allions moderniser nos transports régionaux, mais nous allions le faire en vous donnant la parole». «Il y a 100 jours, poursuit-il, le 5 octobre dernier, j’ai annoncé ma décision de rompre les discussions en cours avec la SNCF. Parce qu’il est temps que les usagers bénéficient d’un service de qualité et que le contribuable paie le juste prix du service qui est rendu». Souligne qu’il a formulé un certain nombre de propositions, «sur l’expérimentation de la concurrence, sur la possibilité de voir des cars à haut niveau de service se substituer, pourquoi pas, aux trains sur certaines lignes…» annonçant entre autres qu’autour de ces propositions, «un grand débat avec les habitants aurait lieu». «C’est tout le sens de ces Assises des Transports, poursuit-il, parce qu’il est grand temps de rendre la parole aux usagers». Considérant: «Sans adhésion populaire, il n’est point de réforme salutaire. Sans participation des usagers et acteurs concernés, c’est l’immobilisme et la sclérose assurés. Au fond, c’est accepter que perdure la situation dans laquelle les transports régionaux se sont peu à peu englués depuis des décennies. Et savez-vous pourquoi depuis tant d’années, personne n’a rien fait, et que tout le monde a laissé la qualité du service se dégrader inexorablement ? Simplement par lâcheté».
«Je suis un peu blessé par ses propos»
Des propos qui, l’après-midi, lors de la conférence régionale consultative, feront réagir, Jean-Yves Petit, Région Coopérative, vice-président en charge des transports sous la précédente majorité. «Je suis un peu blessé par ces propos sachant toutes le actions menées en direction du Transport et notamment avec la SNCF. Nous avons fait beaucoup de choses bien, que nous avons d’ailleurs souvent voté à l’unanimité. y compris pour le devenir de la ligne Nice- Breil-Tende qu nous n’avons jamais eu l’intention de laisser tomber». «Je me garderais, poursuit-il, de propos excessifs sur le bilan 2016 tant je sais combien il est complexe de travailler sur les transports dans cette région. Nous avons à faire face à des retards de 40 à 50 ans sur certains équipements. Ceci dit, je pense que, même si la SNCF est fautive, vous n’avez rien à gagner à vous en prendre, dans votre communication, aux cheminots qui font ce qu’ils peuvent». Christian Estrosi de répondre: «Mes propos étaient tournés contre la SNCF, je m’adressais directement à son PDG, Guillaume Pépy. Et que je sache, lorsqu’il était président Michel Vauzelle ne s’est pas privé lui aussi d’adresser de vives critiques à la SNCF». «Je considère, ajoute-t-il, que la situation ne cesse de s’aggraver. Et je ne suis pas le seul président de région à la considérer puisque des régions, de droite comme de gauche, nous emboîtent le pas. Et je sais que vous vous étiez engagés dans la défense de la ligne Nice-Breil comme je rends hommage à la reprise en régie du train des Pignes, sans cela je ne suis pas sûr que cette ligne fonctionnerait encore».
Jean-Yves Petit reprend: «Il est une priorité, les usagers et la réponse que vous allez apporter à leurs difficultés actuelles. Il y a des suppressions d’arrêts, des trajets plus longs. Il faut que les usagers soient mieux associés; Il y a un manque de réponses sur l’intermodalité et il est nécessaire d’expliquer ce que pourrait être le plan transport». Il s’inquiète enfin: «Qu’en est-il de la ligne Gap-Briançon? On évoque un service par cars en lieu et place du train?». Le président Estrosi répond: «Nous entendons bien prendre en compte les attentes des usagers. Concernant la ligne des Alpes, nous nous battons, nous investissons 10 millions d’euros et la région Rhône-Alpes-Auvergne vient d’annoncer qu’elle participera également au financement».
Une région attractive c’est une région accessible
Au-delà de ce débat avec le militant écologiste, le président Estrosi reprend son propos: «J’ai coutume de dire qu’une région attractive c’est une région accessible (…) Et je le dis très clairement, la SNCF n’a pas été à la hauteur des enjeux ! Elle a fait de Provence-Alpes-Côte d’Azur la pire région de France en matière de transports. Nous détenions tous les records. Record de grèves, record d’annulations, record de retards… Il y avait donc urgence à agir». «Aujourd’hui, enchaîne-t-il, plus de 100 000 Provençaux, Alpins et Azuréens voyagent chaque jour en TER. Chaque jour, la Région, c’est-à-dire les contribuables de Provence-Alpes-Côte d’Azur, dépense près d’1 million d’euros pour les TER, 300 millions d’euros par an. Qui comprendrait, dans ces conditions, que le Président de la Région se contente du statu quo quand 2 trains sur dix subissent des retards, 1 sur 10 est annulé et que les usagers doivent affronter les conséquences de plus de 90 jours de grèves en 2016».
Il annonce également le lancement, voilà une semaine, de l’application mobile «Usagers TER ». «Elle vous permettra non seulement de dialoguer directement avec les agents de la collectivité sur la qualité des TER mais aussi de nous signaler des dysfonctionnements. Problèmes de sécurité, de propreté, de retards ou d’annulations. Grâce à cette application vous ne serez plus démunis face à l’insupportable mutisme de la SNCF». Il signale également: «Nous avons mis en place une Conférence citoyenne. Celle-ci se réunira les 4 février et 1er avril prochains. Elle permettra à une trentaine de citoyens représentatifs de l’ensemble de nos 100 000 usagers quotidiens de nous faire remonter leurs propositions. Et nous nous retrouverons le 27 avril prochain pour vous dévoiler les conclusions de ces Assises».
Nous fixons désormais unilatéralement le coût du service
Il conclut en dressant le bilan des relations avec la SNCF. «Le 3 octobre dernier, j’ai sifflé la fin de la partie en rompant les négociations avec la direction de la SNCF. Cela signifie que nous fixons désormais unilatéralement le coût du service avec un premier bénéfice immédiat : 44 millions d’euros d’économies réalisées pour la Collectivité. Je ne pouvais plus accepter que les 5 millions d’habitants de notre région continuent à payer les délires tarifaires d’une SNCF qui augmentait toujours ses tarifs en fournissant un service de plus en plus mauvais». Une rémunération à la performance a été mise en place. Si le service est de bonne qualité, la Région payera la SNCF. Si tel n’est pas le cas, l’entreprise sera sanctionnée. «Et nous avons mis en place un contrat d’objectifs qui, s’il n’est pas respecté, nous permettra d’infliger des pénalités à la SNCF.».
Au terme de cette journée Philippe Tabarot, juge: «Cette première est un succès par le nombre et la diversité des présents. Nous allons faire en sorte de renforcer le processus de concertation sachant que nous nous battons pour le train, la Ligne nouvelle et une offre complémentaire entre routier et ferroviaire. Il faut savoir que nous sommes dans la région qui offre le plus petit nombre de kilomètres de voies ferrées par habitant et que, de plus, les installations sont vieilles et saturées». Il considère enfin: «Notre objectif le plus complexe est sans doute celui qui vise à parvenir à une tarification et une billetterie unique. Mais nous devons avancer sur tous les dossiers car aujourd’hui le nombre d’usagers des transports en commun est en baisse par peur du manque de fiabilité».
Michel CAIRE
Reprise des négociations avec la SNCF; les 5 conditions de Christian Estrosi
«Je n’accepterai aucune reprise des négociations tant que la SNCF n’aura pas : mis en place le dédommagement complet de tous les usagers pour les annulations et les retard. C’est l’élargissement de la garantie fiabilité TER qui sera mise en place pour les abonnés au 1e avril. Le renforcement de la sécurité dans nos trains avec le déploiement des équipes mobiles de sécurité et de la vidéo-protection sur 80% des flux de passagers là où nous sommes à 60% aujourd’hui. Le développement des infrastructures de maintenance avec la construction d’un deuxième centre de maintenance à l’est de la région qui devra, impérativement, être mis en service avant 2020. Des taux de ponctualité et d’annulations des trains qui soient véritablement améliorés. Si la SNCF fait la lumière sur les coûts du service rendu et nous donne une véritable trajectoire financière sur la durée totale de la convention».