Notre législation en matière de fin de vie, notamment la loi Claeys-Leonetti de 2016, offre la possibilité de mobiliser des dispositifs et des pratiques permettant à chacun d’exprimer ses volontés concernant ce moment particulier de sa vie : la rédaction de directives anticipées, la désignation d’une personne de confiance, le droit de refuser ou de solliciter l’arrêt des traitements (y compris la nutrition et l’hydratation artificielles), la possibilité de demander, sous certaines conditions, à être sédaté profondément jusqu’au décès. Autant de dispositifs, aujourd’hui encore insuffisamment connus, qui visent à respecter les préférences de chacun.
Malgré cela, une partie importante de la population se trouve encore confrontée au décès d’un proche ou la perspective du sien sans disposer de l’ensemble des connaissances nécessaires pour prendre des décisions éclairées et pour que celles-ci soient respectées.
C’est dans ce contexte qu’Emmanuel Macron a annoncé, en pleine campagne présidentielle, que le sujet de la fin de vie ferait l’objet d’une convention citoyenne pour que l’accompagnement des malades et de la fin de vie soit la grande réforme sociétale du second quinquennat du président de la République.
Cependant, le projet de loi qui autorisait l’euthanasie ou le suicide assisté pour les malades majeurs en fin de vie qui le demanderaient, sous réserve d’une autorisation médicale et sur la base de plusieurs critères, a été brutalement interrompu en juin par la dissolution.
Ce texte inabouti pose des questions cruciales comme le souci de ne laisser personne dans la détresse face à la douleur et à la mort ou le risque que « l’aide à mourir » favorise insidieusement la disparition de certains malades parce que trop âgés, impécunieux ou trop « coûteux ».
Rappelons que l’égalité devant les soins palliatifs, pourtant garantie par la loi Kouchner de 1999, n’est toujours pas effective et selon les chiffres de l’inspection générale des affaires sociales, 62% de personnes décédées en 2021, qui auraient dû bénéficier de soins adaptés en ont été privées.
Mais comment ignorer le fait que 90% des Français se disent favorables à la possibilité d’une aide médicale pour abréger une vie intenable et que 75% des membres de la convention citoyenne aient souhaité que le projet de loi le permette ?
Alors que la crainte d’une déconnexion entre les élus et les préoccupations des citoyens ne cesse de s’amplifier, il apparaît dangereux de remettre aux calendes grecques l’examen du projet de loi sur la fin de vie.
C’est à la représentation nationale d’arbitrer entre la réticence des médecins à recourir à l’euthanasie connaissant par leur pratique, l’ambivalence du désir de mourir des patients et l’attente fort des français d’un texte législatif encadrant l’aide à mourir…
Fabien Perez est avocat et conseiller municipal en charge des Financements en européens