Publié le 23 novembre 2017 à 20h56 - Dernière mise à jour le 28 octobre 2022 à 17h47
Malgré une condamnation à deux mois de prison ferme pour des propos antisémites, négationnistes et révisionnistes, 8 000 personnes sont venues acclamer le nouveau spectacle de Dieudonné intitulé «La guerre» donné ce dimanche 19 novembre à Marseille. Le même week-end étaient découverts, dans le 6e arrondissement de Marseille, le mot «Juif» tagué sur des murs, des devantures de magasins ou des stores de garages. Sans établir un lien de cause à effet entre ces deux événements, on ne peut que constater leur troublante unité de temps et de lieu et, surtout, le peu de réactions qu’ils ont engendré de la part de la classe politique locale.
La responsabilité de tous est engagée
Au-delà des élus, c’est bien la responsabilité de tous qui est engagée. Celle de celui qui monte sur scène, celle de ceux qui ne lui ont pas interdit de le faire, et bien entendu celle de ceux qui, comme l’a justement rappelé l’ancien Premier ministre Manuel Valls, «sont venus assister au spectacle d’un raciste et d’un antisémite qui incite à la haine».
Quant à ceux qui ont tagué le mot « Juif » sur des devantures de magasins, comment ne pas considérer l’abominable symbole que représentent de tels actes face à l’Histoire, et qu’ils engagent non seulement la responsabilité de ceux qui les ont commis, mais aussi celle de ceux qui les constatent là encore sans réagir, quelques jours à peine après la commémoration de la «nuit de cristal» du mois de novembre 1938.
Il faut une réponse politique et citoyenne
Marseille, ville multiculturelle, a longtemps été tenue à l’écart des tensions que le reste de la France a pu connaître. Mais aujourd’hui, ce modèle du vivre ensemble montre ses limites. Même si des expériences riches à partir du tissu associatif et génératrices d’espoir ont pu voir le jour, il est impératif qu’une voix courageuse unissant politiques et membres de la société civile puisse s’exprimer sans tabou pour remettre l’intérêt républicain et tous les citoyens au centre de la problématique.
La lutte contre le racisme et l’antisémitisme sont trop importants pour les laisser aux seules victimes
La lutte contre le racisme et l’antisémitisme sont des sujets trop importants pour que cette tâche, ô combien difficile, soit laissée aux seules personnes qui en sont les victimes directes. Car à travers ces exactions, c’est bien la République toute entière qui est visée et mise en danger. La laïcité que les pères fondateurs n’ont pas voulu enfermer dans une définition corsetée, est cet espace privilégié qui permet à chacun d’exister pleinement tout en respectant autrui. Et c’est l’outil que nous devons utiliser pour préserver ce fragile équilibre entre le collectif et l’individuel, et assurer la cohésion de notre société. Cela exige que nous adoptions des règles communes et respections des interdits, et qu’une autorité publique s’exerce sans faillir, y compris bien entendu pour mettre en œuvre des actions de fond au travers de l’éducation, de l’information, de la culture, et qu’elles s’exercent dans la durée.
La banalisation du mal
Lorsque des actes racistes et antisémites sont perpétrés sans réaction adaptée, le danger est aussi que leur répétition ne finisse par les faire considérer comme la norme. Une norme qui nous dispenserait de réagir. Nous y sommes déjà lorsque l’on constate que ce qui choque maintenant le plus souvent, c’es d’oser condamner le mal et ses auteurs. Nous n’avons d’autre choix que d’affirmer collectivement que ce n’est pas de dire la vérité qui est clivant, mais de se taire ou de regarder ailleurs.
Laurent Lhardit, Conseiller PS du 3e secteur de Marseille
Hagay Sobol, Conseiller PS du 6e secteur de Marseille