Publié le 6 mars 2018 à 14h14 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 13h46
Jean-Claude Gaudin, maire de Marseille depuis 1995, a récemment annoncé qu’il ne briguerait pas un nouveau mandat aux prochaines élections municipales. Encore que, les promesses n’engagent que ceux qui les croient. Toujours est-il qu’après quatre mandats, on ne peut que l’inviter à prendre sa retraite. Du coup, certaines et certains élu-e-s, présidente ou président de droite des grandes collectivités, parlementaires le plus souvent, réfléchissent à la suite et fourbissent leurs armes pour conquérir le «Graal» : être Maire de la deuxième ville de France.
Pourtant 2020 est encore loin
L’heure serait pourtant plus à s’occuper du quotidien des Marseillais, dont la majorité est malmenée par une politique libérale qui exclut. Privatisation des écoles publiques, cités angoissantes et zones de non droit, logements insuffisants et parfois insalubres, discriminations à l’emploi, précarité, hôpitaux publics saignés, jeunes et moins jeunes sans toit, désindustrialisation, équipements sportifs en décrépitude, déplacements d’un autre âge, inaccessibilité à de nombreux services publics, vente de la ville à la découpe, patrimoine antique et espaces verts investis pour la spéculation immobilière, trafics en tout genre impunis, pollutions… Les sujets ne manquent pas pour se mobiliser.
Des associations, des collectifs, des organisations syndicales et certains élus de l’opposition municipale se mobilisent sur ces sujets, pour arracher des victoires contre les politiques libérales qui transforment la ville de la plus mauvaise des façons et accroissent le mal vivre particulièrement dans les quartiers populaires. Des actions utiles, mais pas toujours efficaces, faute de rapports de forces favorables par manque de coordination et de prolongement politique dans le sens noble du terme. Certes, rien n’empêche de préparer les prochaines municipales, mais l’urgence est de créer les conditions d’un vrai changement de politique, tant Marseille est plus inégalitaire qu’elle ne l’était il y a vingt-cinq ans. Tant nombreuses et nombreux sont les Marseillaises et les Marseillais à aspirer à des choix politiques qui répondent à leurs aspirations et les sortent des problèmes qui non seulement n’ont pas été résolus mais les empoisonnent chaque jour un peu plus. Ce n’est pourtant pas ce que certains préparent.
Ça grenouille dans le Landerneau politique
Ainsi une petite élite s’agite, se rapproche, discute, échafaude des stratégies autour d’un déjeuner ou d’une rencontre en catimini, tout en laissant fuiter les indiscrétions nécessaires à faire monter les enchères et les spéculations dont se délectent ceux qui croient faire l’Histoire. C’est à celui ou celle qui fera le plus de «buzz». Celui ou celle qui aura la petite phrase la plus saignante pour être reprise en boucle sur les réseaux sociaux. Une petite élite avide de pouvoir pour briller personnellement, cherche à éliminer plutôt qu’à rassembler. Des «personnalités» qui, malgré leurs discours sur le changement de pratique de la politique, continuent d’appliquer les mêmes recettes et creusent le fossé déjà abyssal avec la majorité des habitants. Une caractéristique que l’on analyse lors des élections au travers de taux d’abstention préoccupants pour la démocratie.
Ainsi à Marseille, à deux ans des prochaines municipales, ça cogite, certains multiplient des déclarations cinglantes, assassines, donnant de la politique la plus mauvaise image, à l’instar d’une piteuse série américaine qui dégoûte plus de la politique qu’elle n’intéresse. C’est même une stratégie pour rester dans l’entre-soi et pour continuer de rouler pour la finance. Alors ça se contorsionne pour savoir qui sera Calife, après l’actuel maire. Certains s’affranchissent des partis politiques devenus «ringards» à leurs yeux, sans doute ne sont-ils pas assez autocratiques. D’autres créent leur mouvement, avec des «sachants», influents médiatiquement et financièrement, pour mener des campagnes de plus en plus coûteuses. Se présentant comme modernes, nouveaux, neufs, plus jeunes, différents, et j’en passe, tous sont dans les stands, avant de se mettre sur la ligne de départ pour le poste prestigieux de Maire de la deuxième ville de France. Les compétences de la municipalité sont pourtant siphonnées par la Métropole et Marseille est de plus en plus sous perfusion des autres collectivités.
Dans ce contexte, la Palme revient à Renaud Muselier
Lui qui revient de loin, KO debout en 2012, jetant l’éponge de la politique, ressuscité par les européennes de 2014 et se retrouve – à sa plus grande surprise – Président de la Région Provence-Alpes-Côte-d’Azur. Ce dernier se dit qu’il tient enfin, la revanche de sa vie. Celui qui a longtemps été le dauphin annoncé de l’actuel Premier magistrat de la Ville, puis évincé, peut, cette fois peut-être y arriver… et, sans l’appui de l’écurie sortante. Pire en la fustigeant pour mieux se démarquer et montrer à ceux qui n’ont pas de mémoire, que la nouvelle droite fera autre chose que la politique libérale et inégalitaire menée depuis 23 ans. Dans ce processus de course à l’échalote, il faut bien convaincre, marquer les esprits et engraisser au passage quelques boites de «story telling».
Le premier sondage est ainsi tombé ces derniers jours
Commandé par le Président de la Région, histoire de se rassurer et de manipuler les esprits. Celui qui paie, ne peut pas être le dindon de la farce. Un sondage à 2 ans de l’échéance municipale. Un sondage sur 700 personnes, un nombre trop faible pour être fiable. Un sondage sur tout Marseille, alors que le scrutin se fait sur 8 secteurs. En sondant des personnalités qui ne sont parfois même pas candidates. On spécule, on triture, on annonce des chiffres pour séduire certains et chercher à en démobiliser d’autres. Mais à aucun moment, n’est évoqué le vécu des habitants. Aucune proposition novatrice n’est avancée. Le fond, la réflexion, cette élite s’en moque. Elle reprend surtout l’adage appliqué par Macron : tout changer pour que rien ne change. C’est la recherche du «pouvoir» pour continuer de servir les riches et continuer d’écraser les familles modestes, les travailleurs, leur faisant croire que sans droits, sans statuts, sans garanties, ça ira mieux demain.
L’idée même d’associer les citoyens, les rassembler pour construire un «projet» pour Marseille, pour une ville de vivre ensemble, ne les effleure même pas. Ces «stars» de la politique politicienne ne vont quand même pas s’abaisser à rencontrer les «gens». A les accompagner pour les sortir de leurs galères… sauf si au bout, une ou plusieurs voix peuvent être monnayées. Le clientélisme, c’est les autres. Elles, ces stars de la politique politicienne, font de la politique «autrement», proprement, elles le jurent. Et ce n’est pas de leur faute, si certains leur font allégeance, moyennant un service, petit ou grand, le jour où le nouveau Calife sera dans le siège suprême.
La course à la mairie de Marseille est donc bel et bien partie
Qu’importe si Macron casse tout le pays. Qu’importe s’il met à genoux des millions de Français pour engraisser toujours les mêmes. Qu’importe que ceux à la tête des Collectivités locales et régionales accompagnent la politique d’austérité puissance 10 menée par l’exécutif. Ils en partagent le fond : privatiser la société française. Qu’importe l’intérêt général qui est l’essence même de la Politique. Qu’importe la vie des gens. Qu’importe car, la plupart de ceux qui sont dans ce poker menteur pour la candidature à la candidature, ne vivent pas les angoisses, l’incertitude du lendemain, l’avenir d’une majorité des Marseillais pour eux et leurs enfants. Ce qui les intéresse c’est le «Pouvoir», pour ensuite dire, une fois la victoire d’être dans le siège suprême, ne pas pouvoir changer de politique, qui masque mal de ne pas vouloir changer le système qui sévit à Marseille depuis des décennies.
Mais la messe est loin d’être dite
Rien n’est joué, car il reste la seule voie qui a toujours changé le cours de la vie, qui a fait l’histoire, avec un grand «H», c’est la prise en mains par les citoyennes et les citoyens de leur propre avenir. Il devient urgent et indispensable de construire un rassemblement populaire majoritaire avec le mouvement associatif, le mouvement social, et des partis politiques véritablement à gauche, des partis à investir pour déjouer les manœuvres petites ou grandes. Alors, mettons nos egos de côté. Tirons les enseignements des expériences du passé. Soyons intelligents. Et créons les conditions d’un rassemblement de la gauche autour des valeurs qui la caractérisent (justice sociale, égalité de droits, fraternité, solidarité, respect de l’humain et de l’environnement) et d’un projet de progrès social et d’émancipation humaine pour Marseille, pour faire en sorte que ni la droite, ni l’extrême droite ne gèrent notre belle Cité après 2020.
Comme je l’écrivais dans une contribution en 2014 «Aux armes, citoyens !», et qui n’a pas pris une ride : «Les élections municipales peuvent ouvrir une nouvelle ère. A Marseille, la gauche peut se révolutionner pour engager une autre dynamique et créer un immense appel d’air. C’est pourquoi je lance un appel à l’engagement citoyen pour que la ville se bâtisse sur nos énergies, nos aspirations, notre créativité, notre passion, plutôt que de s’essuyer les pieds dessus comme sur un paillasson. Je lance un appel à l’engagement citoyen pour nous réapproprier Marseille, pour nous réapproprier nos vies, pour avoir plus que notre mot à dire une fois tous les six ans sur l’avenir de nos enfants». Ne laissons pas d’autres, s’occuper de nos propres vies.
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