Publié le 27 juillet 2017 à 13h40 - Dernière mise à jour le 28 octobre 2022 à 17h18
La question de la succession de Mahmoud Abbas à la tête de l’Autorité palestinienne se pose pour au moins deux raisons. En premier, le Président actuel n’est pas populaire auprès de la population. Un sondage effectué du 29 juin au 1 juillet 2017, indique que 61.7% de la population palestinienne souhaite la démission de Mahmoud Abbas de son poste de Président de l’Autorité palestinienne, 55.1% en Cisjordanie et 74.7% dans la Bande de Gaza. A la question de savoir si les Palestiniens sont ou non satisfaits de sa politique, 60% répondent n’être pas satisfaits (53% en Cisjordanie et 73% à Gaza).
En second, il a plus de 81 ans et il est Président depuis plus de 10 ans, alors qu’il n’a plus eu d’élections depuis 2006. Le même sondage pose alors la question de savoir qui aurait la faveur du public dans l’hypothèse d’une démission de M. Abbas, et le candidat le plus populaire, y compris à Gaza, mais dans des proportions moindres qu’en Cisjordanie, reste Marwan Barghouti, actuellement en prison en Israël. Le problème est que Barghouti est condamné à de lourdes peines, et les Israéliens ont fait savoir à plusieurs reprises n’avoir pas l’intention de l’élargir. Mais, en ce domaine qui sait si l’avenir n’apportera pas une surprise.
En avril 2016 le Président palestinien M. Abbas a fait en sorte que Saeb Erakat, Secrétaire Général de l’Organisation le Libération de la Palestine (OLP), et responsable des négociations avec les Israéliens, puisse être nommé Président par intérim dans l’hypothèse où lui-même ne pourrait plus (ou ne souhaiterait plus) assurer la présidence de l’Autorité palestinienne (AP) durant les deux mois qui suivront. Cette période devrait être mise à profit pour l’organisation de nouvelles élections présidentielles. Cette stratégie est remise en cause, car Saeb Erakat devra subir une transplantation pulmonaire dans les prochaines semaines qui va le rendre indisponible pendant une longue période. La question se pose alors de savoir quels seraient les candidats potentiels les mieux placés pour succéder à Mahmoud Abbas. Rappelons, à cet égard que le président actuel de l’Autorité palestinienne a plus de 81 ans. Compte-tenu de l’absence d’informations solides, on ne peut qu’énoncer quelques hypothèses sur les candidats potentiels. Prenons le risque d’être démenti. Deux candidats semblent être en pole position : Mohammad Dahlan d’une part, et le Major Général Majid Faraj, d’autre part.
Mohamad Dahlan est originaire de Khan Younis, ville située dans la Bande de Gaza. Il avait été dans le passé un animateur actif de l’Intifada de 1987, et au retour d’Arafat de Tunis et après l’accord d’Oslo de 1993, il avait été nommé par Yasser Arafat, responsable des services de sécurité à Gaza. En 2006-2007 il avait dû abandonner son poste et la Bande de Gaza pour les pays du Golfe, à la suite de la prise du pouvoir par le Hamas. Depuis, il s’était gravement brouillé avec le Président Abbas, dont il contestait ouvertement l’autorité. C’est la raison pour laquelle le principal mouvement politique en Cisjordanie, qui soutient Abbas, le Fatah a, en novembre 2016, rejeté Dahlan. En revanche, Il s’est beaucoup rapproché des grands pays sunnites, en particulier du quartet arabe composé de l’Égypte, de la Jordanie, de l’Arabie Saoudite et des Émirats Arabes Unis, qui le soutiennent activement. Il dispose d’un certain nombre d’atouts qui pourraient favoriser son retour dans la Bande de Gaza…et de là, partir à la conquête du pouvoir en Cisjordanie. Alors que le Hamas et l’Égypte sont en froid, le nouveau chef du Hamas, Yahya Sinwar, lui-même originaire de la même ville, Khan Younis, que Dahlan, a, en juin dernier, rencontré les officiels égyptiens au Caire, et ses adjoints chargés de la sécurité, ont rencontré les proches de Dahlan. Il est fort probable que Dahlan et Sinwar se soient rencontrés. Un accord entre le Hamas et Le Caire a été conclu aux termes desquels les livraisons de fuel seraient assurées. Dahlan a probablement facilité la réalisation de cet accord. Les livraisons ont effectivement été réalisées. Les égyptiens ont livré 1.2 million de litres de fuel afin d’alimenter l’unique centrale électrique du territoire palestinien. Ce geste est d’autant plus important que les habitants de Gaza ne disposaient que de 3 à 4 heures par jour d’électricité. Les hôpitaux ont dû ne compter que sur des générateurs pour assurer les soins. Or, ces générateurs fonctionnent au fuel. D’où l’importance de ces livraisons. Ashraf Al-Qidra, porte-parole du ministère de la Santé à Gaza, condamne aussi bien l’AP que l’occupation israélienne. A cause des décisions prises par l’AP, les livraisons de médicaments, en particulier ceux qui sont nécessaires au traitement du cancer, ont diminué de 35% depuis mars dernier. Cette situation est directement liée à la réduction de livraison de fuel par les Israéliens. Ceux-ci ont pris cette décision car M. Abbas a fait savoir qu’il ne paierait plus les livraisons de fuel. Cette décision fait suite à celle consistant à réduire les salaires versés aux fonctionnaires de la Bande de Gaza qui, depuis 2007, date à laquelle le Hamas a pris le pouvoir, recevaient leur traitement de l’Autorité palestinienne, basée en Cisjordanie. Ces décisions visaient clairement à affaiblir le Hamas, afin de le contraindre à se rapprocher du Fatah, parti de Mahmoud Abbas. L’aide égyptienne, organisée par Dahlan, remet en cause cette stratégie et renforce les chances de celui-ci de prendre le pouvoir.
L’autre candidat potentiel est Majid Faraj, l’actuel chef du renseignement palestinien. Il a pour lui un certain nombre d’atouts. En premier, il est fortement appuyé par Mahmoud Abbas, qui souhaiterait en faire son successeur. En second, il a participé, depuis de longues années aux négociations de paix avec les Israéliens, aussi il a la mémoire du contenu exact de celles-ci. C’est un atout non négligeable. Par ailleurs, en tant que responsable des services de renseignement en Cisjordanie, il est quotidiennement amené à travailler étroitement avec les Israéliens afin de contrer les éventuelles opérations terroristes, en particulier celles qui sont à l’initiative du Hamas.
Affaire à suivre…
Le Professeur Gilbert Benhayoun est le président du groupe d’Aix -qui travaille sur les dimensions économiques d’un accord entre Israël et les Territoires palestiniens- qui comprend des économistes palestiniens, israéliens et internationaux, des universitaires, des experts et des politiques. Son premier document, en 2004, proposait une feuille de route économique, depuis de nombreux documents ont été réalisés, sur toutes les grandes questions, notamment le statut de Jérusalem ou le dossier des réfugiés, chaque fois des réponses sont apportées. |