Publié le 20 juillet 2016 à 8h49 - Dernière mise à jour le 29 novembre 2022 à 12h31
Le terrorisme «aveugle» vient une fois de plus ensanglanter la France. Comme à chaque fois, submergés par une émotion bien compréhensible, nous cherchons des responsables. Chacun énonce les manquements et les solutions «évidentes» qui depuis des lustres auraient dû être mises en œuvre. Mais, si cela était aussi simple, ce ne serait pas une menace globale et ces mesures auraient déjà été appliquées. En réalité, nous payons aujourd’hui au prix fort un déni collectif, celui d’un mal qui nous ronge de longue date, l’islamisme. Dans cette lutte contre la barbarie et pour notre survie, la route sera longue et difficile. Et, pour vaincre nous ne pouvons aller désunis à la bataille.
Tous responsables
Il ne faut pas se laisser aveugler par la haine en désignant des boucs émissaires tout trouvés, où viennent en tête de liste, les élus taxés de laxisme et d’incompétence, les musulmans dans leur ensemble et les étrangers en général. Car, il est plus aisé d’accuser que de voir la vérité en face. La responsabilité de la situation actuelle est partagée. Elle incombe en tout premier lieu aux assassins qui prônent le djihad, les idéologues comme leurs bras armés !
Cependant, une majorité d’élus, au nom d’un politiquement correct incompréhensible, n’a pas voulu nommer le mal, ceux qui instrumentalisent une religion, l’islam, à des fins de pouvoir et de conquête. D’autres, avec des arrières pensées électoralistes, ont «caressé dans le sens du poil» les radicaux, tolérant un discours de haine. Et enfin, ne sont pas exempt de reproches, loin s’en faut, ceux qui, alors qu’ils étaient aux commandes, n’ont pas appliqué les solutions miracles qu’aujourd’hui ils prônent en vilipendant le gouvernement. Ces postures discréditent le monde politique et jettent les électeurs dans les bras d’un autre extrême. Il est désormais grand temps de dire la vérité, et de la dire d’une seule voix. Car la lutte contre le terrorisme n’est pas un sujet de politique politicienne.
Mais cette vérité doit également être entendue pour ce qu’elle est, par les électeurs. Car les élus ne sont jamais que l’expression d’un choix qui sort des urnes, pas une vue de l’esprit. Les citoyens doivent admettre le fait que la lutte sera d’autant plus rude que l’ennemi est impitoyable. Et le prix à payer sera très élevé.
Le profil des terroristes a changé
Dès 2012, j’écrivais qu’il fallait tout faire pour éviter que les «loups solitaires deviennent des loups solidaires», en m’insurgeant contre la qualification hâtive de l’auteur des attentats de Toulouse et de Montauban. Ce qui est à l’origine de mon engagement politique et qui me valut par la suite d’être auditionné par la commission d’enquête de l’Assemblée Nationale sur les filières et les individus djihadistes.
Désormais nous y sommes. A côté des filières de djihadistes aguerris exigeant une logistique, des compétences, et une préparation minutieuse, il y a une menace d’une autre nature et imprévisible. Celle représentée par ces «loups solitaires» et autres «déséquilibrés» qui pour la plupart s’autoradicalisent via internet. S’ils définissent eux-mêmes leurs objectifs, ils participent authentiquement à un plan d’ensemble conçu par les théoriciens du djihad. Il suffit pour s’en convaincre de consulter la propagande de Daesh. Comme ils agissent en dehors des filières traditionnelles, ils sont excessivement difficiles à identifier avant le passage à l’acte.
D’autre part, loin des clichés, les terroristes ne se recrutent pas exclusivement dans une catégorie ethnique ou sociale. D’Hervé/Djamel Loiseau mort en Afganistan en 2001 jusqu’aux attentats de Paris en 2015, avec Fabien Klein, ils sont nombreux à ne pas correspondre à ce stéréotype que certains propagent pour mieux nous tromper et nous monter les uns contre les autres. De même que la précarité ou la détresse sociale ne peuvent, à elles seules, expliquer ce cheminement. Les auteurs des attentats du 11 septembre 2001 ou plus récemment de Dacca au Bangladesh étaient diplômés et issus de la classe aisée.
Des mesures à la hauteur du danger
Tous les moyens avaient été déployés pour que l’Euro2016 se passe pour le mieux. Il suffisait d’attendre…
On comprend dès lors que ce ne sont pas des «mesurettes» qui pourront enrayer ce processus implacable et d’échelle planétaire. Il faut au contraire mettre en place une logique de système intégré et coordonné, non seulement au niveau national, mais au niveau européen et mondial, avec un partage des renseignements, du savoir-faire et des ressources. Et les besoins sont énormes. Imaginons simplement le temps et les structures nécessaires pour former des personnels compétant devant assurer les missions qui leur seront confiées.
Si dans cette lutte existentielle, le cloisonnement est un obstacle, par symétrie, il ne peut donc exister un bon et un mauvais terrorisme. Celui que l’on combat et celui que l’on tolère. Car le justifier ailleurs revient à l’accepter chez nous.
De même, il est illusoire de penser qu’en négociant avec les groupes ou États terroristes, ils seront nos alliés, ou que cela évitera la mort de «Français innocents». Les islamistes qu’ils soient sunnites ou chiites, ont leur propre agenda et dans tous les cas de figure, il y a un retour de boomerang. L’histoire l’a amplement démontré.
Tous unis contre la barbarie !
Plutôt que de se renvoyer les uns les autres la responsabilité du carnage de Nice, nous n’avons d’autre choix que celui de l’unité. C’est ensemble que nous vaincrons et c’est divisés que nous perdons. Montrons à ceux qui ont juré notre perte qu’en nous frappant un 14 juillet, ils ne nous ont pas mis à terre mais qu’ils ont renforcé notre détermination. Car cette commémoration nationale est une fête de combat contre la tyrannie, contre tous les totalitarismes qu’ils soient politiques ou religieux.
Hagay Sobol est Professeur des Universités. Cancérologue généticien, il est un des pionniers de la discipline en Europe et cofondateur du nouveau métier de Conseiller en Génétique. Il a occupé des fonctions de responsabilité nationale et internationale.Très investi dans le monde associatif, il milite pour le dialogue interculturel. Elu, il est Conseiller PS dans les 11e et 12e arrondissements de Marseille, et Secrétaire Fédéral chargé des coopérations en Méditerranée