Publié le 28 juin 2021 à 18h57 - Dernière mise à jour le 4 novembre 2022 à 12h47
Les Français par leur abstention marquée aux derniers scrutins ont envoyé un signal clair aux élus, mais ces derniers l’ont-ils bien entendu ?
L’événement le plus marquant du dernier rendez-vous électoral est l’abstention. Le désintérêt des électeurs est à l’image d’une campagne sans relief qui n’a pas su mobiliser après les longs mois de crise sanitaire où le lien social s’est distendu. Sur les plateaux de télévision également, à l’annonce des résultats, les échanges manquaient singulièrement d’originalité et de perspective. Pourtant un certain nombre de réalités émergent que la classe politique, dans son ensemble, serait bien inspirée de faire sienne.
Pas de déferlante bleu marine !
L’extrême droite malgré ses efforts de « relookage », en changeant de nom, ou en essayant d’acquérir une certaine notabilité par l’intégration de personnalités issues de la droite classique, n’a ni réussi à rassembler, ni à convaincre qu’elle était l’alternative. Ceux qui, pour un mandat ont franchi le Rubicon, en rejoignant le RN, ont été sanctionnés comme en région Paca. «Le parti de la fille de son père» n’a pas su mobiliser son électorat comme naguère. Même le vote de rejet n’a pas fonctionné. C’est un désaveu cinglant.
La Droite et la Gauche, le retour !
A un an de la présidentielle, les élections régionales ont démontré qu’il existait encore une Droite et une Gauche en France. Sur les 13 régions, 7 ont été emportées par la Droite et 5 par la Gauche. Même s’il existe une prime au sortant, quand les composantes de ces familles politiques sont unies, elles représentent des forces toujours vivaces alors que le mouvement présidentiel peine à s’implanter localement.
Tout juste élus, les ténors de la Droite lorgnent déjà sur l’Élysée et l’enjeu sera de survivre à un processus de sélection où «il ne devra en rester qu’un», ce qui risque de laisser des traces. Le PS, quant à lui, a fait preuve d’une résilience étonnante. Malgré un engouement réel pour l’écologie, il reste la colonne vertébrale de la Gauche de gouvernement sans qui aucun retour aux affaires n’est possible. Mais cette réalité sera-t-telle acceptée par tous ?
Les élections locales ne sont pas un test national !
Malgré l’enthousiasme des nouveaux élus, peut-on vraiment considérer ces élections comme un test national ? Si les Présidents de région ont été reconduits, malgré l’abstention, c’est qu’à leur poste ils n’avaient certainement pas trop démérité. Pour autant une région n’est pas un pays. Et il semble que pour un candidat à la magistrature suprême, les électeurs ne fondent pas leur choix sur les mêmes déterminants. Ainsi, Marine Le Pen et Emmanuel Macron, les finalistes des la dernière élection présidentielle, n’avaient jamais été à la tête d’un exécutif régional ou départemental. Et dans ce cas précis y-aura-t-il également une prime au sortant ?
Le front républicain pour combien de temps encore ?
Le front républicain a encore joué pour éviter que le RN remporte une région. Mais la digue est fragile. On l’a vu en Paca où la liste d’union de la gauche voulait se maintenir au second tour mais s’est finalement désistée pour faire barrage. Le nouveau Président de la région Sud, Renaud Muselier, s’est engagé à consulter durant sa mandature ceux qui lui ont permis d’être élu et qui par leur retrait ne siégeront pas au Conseil régional. C’est à l’aune de cette promesse que l’on saura si le Front républicain à encore un avenir.
Car le plus grand danger est à venir. Il n’est pas impossible que loin des caméras, une nouvelle droite extrême se prépare. Ce pourrait être la jeune femme qui naguère a posé « un agneau dans les bras » pour inspirer ses électeurs. Elle dispose désormais de l’Institut des sciences sociales, économiques et politiques (ISSEP) qu’elle a cofondé et dont elle est directrice générale. L’ISSEP pourrait bien être le vivier d’où viendront les cadres de sa future action politique plus policée et acceptable que celle de sa tante ou son grand-père. Et si telle est son ambition, elle ne manquera pas de capitaliser sur les erreurs de la Gauche, de la Droite ou de la Majorité, si les élus n’intègrent pas le message que viennent de leur adresser les électeurs !
[(Hagay Sobol est professeur de médecine – spécialiste du Moyen-Orient et des questions de terrorisme – Ex élu PS – et militant du dialogue interculturel. )]