Publié le 24 mai 2017 à 18h23 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 13h46
Il est de longues périodes où rien ne se passe, aucun fait divers à caractère policier n’est révélé ou mis en évidence pour effrayer la toile et enflammer le peuple de Facebook. Puis, parfois la fatalité policière semble s’acharner pour lancer sur la place publique des faits révélateurs d’un malaise de l’institution ou plus simplement se faire le reflet de notre société.
Cette semaine nous avons été gratifiés de deux informations mettant en scène des fonctionnaires de police, l’un malgré lui alors que l’autre détient le record de la bêtise et, si je n’admirais pas autant Michel Audiard je n’aurais pas honte de détourner ce dialogue sublimé par le formidable Jean Gabin : «Si la connerie se mesurait, il servirait de mètre étalon, il serait à l’École Nationale de Police de Nîmes …»
Mais c’est ainsi il semble que la connerie soit la chose la mieux distribuée en France, il n’existe donc aucune raison pour que la police soit épargnée…
La première histoire que les journaux locaux ont largement relayé concerne une plainte déposée par un ancien policier de la BAC Sud dont le patronyme était cité dans un texte écrit par des lumières éteintes d’une cité du sud de la ville et mit en musique par celui qui persiste à hanter les scènes locales avec ses tubes abjects et sa voix immonde, JUL !
Comme si Marseille ne souffrait pas suffisamment il lui fallait encore que ce sbire du Rap soit un autochtone. Mon Dieu quelle misère, les Marseillais ne méritent pourtant pas cela ! Ils ont eu la peste en 1720, l’incendie des nouvelles galeries en 1938 et ils ont Jean-Claude Gaudin depuis 1995… alors de grâce reprenez-le, emportez-le, on vous le donne !
Pourtant nous les Marseillais nous étions fiers de Fernandel et Marcel Pagnol, ensuite la ville a vu naître Jean-Claude Izzo, elle a même vu grandir Zidane et tant d’autres gens de talent alors pourquoi Dieu ou je ne sais qui, nous a refilé cette chose coiffée comme un balai à chiot et brayant dans un logiciel de modification de voix pour que sa cacophonie parvienne à devenir tolérable faute d’être écoutable ?
Lorsque j’entends par hasard l’un de ses morceaux, je dois refréner de véritables envies de meurtres et dois, en guise de contre-poison, écouter l’œuvre totale de Jacques Brel ou de U2. Mais, les séquelles sont lourdes et je me suis surpris récemment à dire à un éditeur qui a lu un de mes ouvrages et devait me donner son avis pour une potentielle édition : «Bonjour, on m’appelle l’OVNI …».
Je n’ai pas signé (avec cet éditeur) … Allez savoir pourquoi…
Mais fort heureusement un élève Gardien de la Paix de l’ENP de Nîmes a évincé la première info en faisant visionner à ses collègues et dans l’enceinte de l’école une vidéo de propagande de Daesh. Depuis, il a rangé la casquette et ses espoirs d’être flic au placard en attendant que son sort soit définitivement scellé en Conseil de discipline. En outre il devra répondre également de ses actes devant un tribunal. Comment et pourquoi de telles choses peuvent se produire, de quelle manière s’est-il procuré la vidéo et quel était son objectif, voilà les questions que se posent la presse dans de brefs articles tout comme les policiers chargés d’enquêter sur cette stupide affaire.
Se procurer de telles images n’est malheureusement pas bien difficile, il suffit de surfer sur la toile pour y découvrir des tas d’immondices qui, pour peu que l’on ait envie de s’encanailler, sont aisément téléchargeables. Quant à savoir le pourquoi de la grotesque diffusion devant un public d’aspirants policiers il suffit de s’introduire dans les têtes de ces jeunes gavés d’images sanglantes virtuelles ou pas pour comprendre la «banalisation» d’une exécution capitale.
Pour le coup et avec le libre-accès à des sites pornographiques ils en viennent aussi à croire que tous les hommes ont des pénis de trente centimètres, qu’ils roulent en Ferrari rouge pour aller acheter leur baguette de pain et s’envoient allègrement des «bombasses» décolorées et siliconées en sniffant à pleins nasaux des rails énormes de cocaïne sous les cris des femelles malgré tout quelque peu courroucées. Le quotidien de l’homme ordinaire que je suis est bien moins reluisant mais, peu importe.
Ainsi je les imagine, installés sur un lit d’une chambre d’apprenti flic et se passer et se repasser inlassablement les images abominables d’un idiot cagoulé hurlant des incantations débiles en décapitant au couteau un pauvre otage occidental incarnant le mécréant.
Mais ce qui me surprend dans cette affaire reste la diffusion de cette vidéo dans une enceinte réputée comme un sanctuaire, comme un haut lieu de l’autorité et de la morale qui doivent et sont enseignées, si tant est que cela n’a pas déjà été fait en direction de nos futurs Gardiens de la Paix. Ce qui me surprend encore c’est ce qui se passe dans la tête de ce jeune homme. Est-ce du voyeurisme, du sadisme ou simplement de la débilité que cet homme a su dissimuler lors des entretiens de recrutement, je n’en sais rien !
J’ai des souvenirs de mon passage à l’école de police et comme les téléphones portables n’existaient encore pas et que nous étions incapables d’imaginer qu’un jour ils débarqueraient, nous formions le soir venu de longues files d’attente devant les cabines téléphoniques. Nous informions nos proches de notre santé psychologique en précisant que les formateurs stupides tentaient de nous faire croire que nous étions les serviteurs d’un État fiable en marchant au pas et en saluant le moindre gradé.
Moi je n’étais qu’obnubilé par le sport et les nanas, la rigolade et la vraie musique en omettant de travailler mes cours et sans réunir mes camarades d’infortune autour d’une vidéo abominable de furieux terroristes pour briller aux yeux de quelques minettes à peine sorties de chez leurs parents.
Ce que je ne sais pas c’est si cette diffusion s’est faite sur fond musical…
Pourvu qu’ils n’écoutaient pas du JUL, sinon il faudrait tous les virer et les faire comparaître devant un tribunal. Dans ce cas là, j’implorerais les magistrats de ne pas être indulgents, il faut une sanction exemplaire pour faire taire le balai à chiot !
Incontestablement les dégâts qu’engendrent ses mélodies ne sont pas encore visibles, ce sont des médecins qui mettront en évidence dans plusieurs décennies les méfaits de cette voix nasillarde et de ces textes ineptes, alors il sera enfin considéré comme le terroriste de la musique. Ses vidéos seront visionnées dans des écoles de police où les élèves ne sauront même plus parler un Français correct et découvriront horrifiés que Brel, Ferrat et J.J Goldman ont vécu et nous ont donné de formidables textes et chansons.
Wesh alors chers lecteurs, je vais me coucher !
Marc La Mola [[Marc La Mola a été flic durant vingt-sept années. Après des débuts à Paris, il rejoint sa ville natale, Marseille et choisit les quartiers Nord pour y exercer. C’est aussi là qu’il a grandi. Officier de Police Judiciaire, à la tête d’un groupe d’enquête de voie publique, il a traîné dans ces quartiers pour en mesurer les maux. Il a touché du doigt la misère et la violence de ces secteurs de la Ville. Marc La Mola a sans doute trop aimé son métier et c’est en 2013 qu’il décide de mettre un terme à sa carrière. Il retourne à la vie civile pour écrire. Il est aujourd’hui auteur, romancier et scénariste. Chez Michalon Éditions il a publié : «Le sale boulot, confessions d’un flic à la dérive», «Un mauvais flic, lettre ouverte à Manuel Valls», «Quand j’étais flic …». Ces trois témoignages relatent les moments forts de sa carrière et ses différentes prises de position. C’est chez ce même éditeur qu’il publiera en mars 2017, «Police, Grandeur et Décadence» dans lequel il explique comment la police en est arrivée à descendre dans la rue pour manifester son mécontentement. Il est encore romancier. Il publie chez Sudarenes Éditions un polar à l’accent Marseillais, «Le sang des fauves». En juin 2017 le personnage de ce premier polar revient dans «Vallis Clausa», deuxième volet des enquêtes de son personnage Randy Massolo, un flic torturé. Il est aussi scénariste et a signé l’écriture de plusieurs synopsis optionnés par des maisons de production. Il enseigne également l’écriture de scénarios à l’École supérieure du cinéma Cinemagis de Martigues (13)]]