Publié le 9 octobre 2017 à 19h14 - Dernière mise à jour le 29 novembre 2022 à 12h30
Même si je dois aujourd’hui faire un mea-culpa et peut-être même battre ma coulpe tant j’ai été grotesque, je dois malgré tout le reconnaître : j’ai eu espoir, à la nomination de Gérard Collomb, de voir les choses changer au ministère de l’Intérieur. J’ai même cru, un instant, que le quotidien des policiers allait être subitement transformé, qu’ils allaient retrouver l’autorité perdue, la fierté d’être flic et enfin la considération de leur nouveau ministre. Que voulez vous je reste un gros idéaliste et un doux rêveur !
Pour m’accabler vous auriez pu encore me dire qu’il était stupide d’envisager une vision novatrice, innovante et moderne d’une police en souffrance dès lors que celui qui est censé orienter ladite vision est âgé de 70 ans et que sa vision à long terme semble compromise. Ne voulant pas faire de jeunisme nous étions néanmoins en droit d’espérer un ministre de l’Intérieur jeune à l’image de notre tout nouveau Président.
Mais, ce dernier en a décidé autrement en nous imposant à la place Bauveau un papy fatigué dont les connaissances en matière de sécurité publique semblent proches du néant comme celles de l’état psychologique des policiers et faisant fi des conditions de l’exercice de leurs missions.
Je le répète, je suis un idéaliste et souvent je pense que ce que je souhaite va se réaliser un peu comme dans les contes pour enfants où le crapaud se transforme en carrosse et la fée, d’un coup de baguette magique, change la moche en canon de beauté. Visiblement le septuagénaire ne dispose ni d’une vision pragmatique et encore moins de baguette aux pouvoirs surnaturels. Nous avons donc hérité d’un «copié-collé» avec ses innombrables prédécesseurs tous caractérisés par une incapacité à douter de soi et d’un ego surdimensionné.
Que voulez-vous la fonction donne des ailes et transforme les moins modestes en montgolfières survolant les problèmes de si haut qu’ils finissent par leur paraître dérisoires voire anecdotiques. Sarkozy roulait des épaules, tout en se réfugiant derrière ses officiers de sécurité, et invectivait les voyous pour s’y frotter au risque de leur servir de petit-déjeuner alors que Valls lui bombait le torse à chaque passage devant une caméra en proclamant que tout se passait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Un candide bien moins philosophe que celui de Voltaire en somme !
Mais revenons à notre ministre actuel que Manuel Valls doit détester tant il pense que le poste lui était attribué à vie comme Jack Lang pense être encore, après plus de quarante ans, le ministre de la Culture. C’est dans la matinale d’Europe 1 et au micro de Patrick Cohen que monsieur Collomb a fait preuve de son ignorance des problèmes des policiers. Il s’est vautré dans la bêtise en recentrant les carences du parc automobile des policiers à … sa propre voiture de fonction ! Consterné, effaré sont les mots qui peuvent le mieux qualifier mon état d’esprit à l’écoute de cette interview lamentable puisque comme tout le monde le sait les policiers travaillent dans des conditions matérielles dignes du plus pauvre pays du tiers-monde et qu’un concours de photos récent à jeté cela en place publique. Il suffit de voir passer dans nos rues un véhicule badgé Police Nationale pour s’interroger sur son fonctionnement, sa crasse et son état de délabrement en se demandant encore comment les policiers peuvent, sans vergogne, verbaliser les automobilistes circulant dans des poubelles parfois en meilleur état que leur propre voiture. Heureusement les voitures de l’État sont dispensées de contrôle technique sans quoi rares seraient celles qui le passeraient avec succès. Mais voilà le ministre ne semble obnubilé que par sa propre voiture de fonction que ses services veulent lui remplacer. Sans doute le cuir des sièges doit être élimé par le tissu des costumes Armani et les tapis usés par les semelles de Weston.
Rassurez-vous amis flics le ministre a demandé que quelques deniers soient dégagés pour (dixit) faire fonctionner la fenêtre qui ne ferme plus et mettre le petit coup de peinture qui va bien … Nous sommes sauvés ! En revanche, en ce qui concerne les 55 suicides par an et les commissariats dans lesquels un cochon ne resterait pas cinq minutes faudra attendre !
Vous avez demandé le ministre ne quittez pas …
Ah pardon il n’entend rien, il est sourd comme un pot !
Marc La Mola [[Marc La Mola a été flic durant vingt-sept années. Après des débuts à Paris, il rejoint sa ville natale, Marseille et choisit les quartiers Nord pour y exercer. C’est aussi là qu’il a grandi. Officier de Police Judiciaire, à la tête d’un groupe d’enquête de voie publique, il a traîné dans ces quartiers pour en mesurer les maux. Il a touché du doigt la misère et la violence de ces secteurs de la Ville. Marc La Mola a sans doute trop aimé son métier et c’est en 2013 qu’il décide de mettre un terme à sa carrière. Il retourne à la vie civile pour écrire. Il est aujourd’hui auteur, romancier et scénariste. Chez Michalon Éditions il a publié : «Le sale boulot, confessions d’un flic à la dérive», «Un mauvais flic, lettre ouverte à Manuel Valls», «Quand j’étais flic …». Ces trois témoignages relatent les moments forts de sa carrière et ses différentes prises de position. C’est chez ce même éditeur qu’il publiera en mars 2017, «Police, Grandeur et Décadence» dans lequel il explique comment la police en est arrivée à descendre dans la rue pour manifester son mécontentement. Il est encore romancier. Il publie chez Sudarenes Éditions un polar à l’accent Marseillais, «Le sang des fauves». En juin 2017 le personnage de ce premier polar a repris du service dans «Vallis Clausa», deuxième volet des enquêtes de son personnage Randy Massolo, un flic torturé. Il est aussi scénariste et a signé l’écriture de plusieurs synopsis optionnés par des maisons de production. Il enseigne également l’écriture de scénarios à l’École supérieure du cinéma Cinemagis de Martigues (13)]]
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