Publié le 21 février 2017 à 9h53 - Dernière mise à jour le 29 novembre 2022 à 12h31
Dans sa tribune, Renaud Muselier (LR), député européen, président délégué de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur met en exergue les failles de la diplomatie française à la suite d’une interview du ministre des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault qui déclare: «La France n’acceptera pas qu’on lui dicte ses choix…»
Dans une interview offensive, le ministre des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault a voulu faire croire à un réveil de la diplomatie française. «La France n’acceptera pas qu’on lui dicte ses choix.», indique-t-il. Comme au Liban, où l’obéissance servile de Laurent Fabius aux positions saoudiennes empêche notre pays d’y jouer le rôle qui devrait être le sien ? Comme en Turquie en juillet 2016, où un faux coup d’État suivi d’une purge digne des plus grandes heures soviétiques n’ont pas suffi à émouvoir Jean-Marc Ayrault ? Comme face à la Russie, quand les sanctions demandées par les États-Unis en juillet 2014, et immédiatement prises par l’Union européenne à l’initiative de la France, ont porté atteinte à nos relations commerciales et mis en difficulté nos propres agriculteurs, nos propres intérêts ? Comme dans le conflit israélo-palestinien, quand la France s’est vautrée dans une position caricaturale, poussant même Laurent Fabius à menacer Israël d’une reconnaissance de l’État palestinien en cas d’échec de négociations ? C’était en janvier 2016, il y a seulement un an. Comme en août 2015 quand, après d’incessantes «inquiétudes» manifestées par les États-Unis, la France a renoncé à la vente programmée à la Russie de navires militaires ? Dans le contexte ukrainien, cela aurait pu être présenté comme une démonstration de force : il n’en a rien été, nous n’étions jamais apparus aussi faibles, aussi influençables. Comme lorsque, le 31 août 2013, Barack Obama téléphone à François Hollande pour lui indiquer la marche à suivre dans la crise syrienne ? Souvenons-nous que, «déterminé» à bombarder les positions du régime de Bachar El-Assad, François Hollande s’est alors immédiatement rangé à la prudence de son homologue américain.
Dans ce dossier, justement, l’incapacité de la France à porter une voix différente de celle de l’allié américain a profondément atteint sa crédibilité. Autrefois interlocuteur crédible et respecté du monde arabe, la France est désormais inaudible. Comme l’était le Royaume-Uni en 2003, quand Tony Blair était considéré comme le porte-voix européen des intérêts stratégiques américains.
D’une puissance objective et respectable, la France est devenue une puissance arrogante et surtout moralisatrice. Le chantre grotesque de l’« Irréel Politik », formule éloquente choisie par Hubert Védrine pour décrire ce nouveau chapitre de notre diplomatie. Prenant comme prétexte les débuts chaotiques de Donald Trump,
Jean-Marc Ayrault essaie de redonner du sens à nos orientations stratégiques. A deux mois de l’élection présidentielle, cela ressemble à s’y méprendre à un baroud d’honneur : une année de ministère au Quai d’Orsay ne peut de toute façon pas suffire à réparer les dégâts causés par Laurent Fabius. Car s’il est nécessaire d’être très vigilant pour éviter l’ingérence russe dont chacun semble aujourd’hui se préoccuper, quelques rappels utiles : C’est la Counter Intelligence Agency américaine qui a espionné la campagne de l’élection présidentielle en 2012. C’est l’Arabie Saoudite qui, depuis mars 2015, mène une guerre sanglante et sans fin contre le Yémen, cumulant massacres de civils dans l’indifférence totale des puissances occidentales. C’est la National Security Agency américaine qui, jusqu’en 2012 et donc sous l’égide de George W. Bush puis de Barack Obama, a espionné les principaux décideurs politiques français. La priorité diplomatique de la France doit désormais être de retrouver son indépendance, sa liberté d’expression, que le monde entier nous enviait. Indépendance vis-à-vis des Russes, des Américains, des Saoudiens, des Iraniens, indépendance vis-à-vis de toutes les puissances qui seule permet de dialoguer d’égal à égal. Car, sur la scène internationale, il n’existe pas de puissance possible pour ceux qui se contentent d’être des perroquets.