Publié le 13 février 2017 à 22h32 - Dernière mise à jour le 29 novembre 2022 à 12h31
Trump Président, telle est la réalité que bien peu de commentateurs anticipaient, tant le candidat a multiplié les outrances et les incohérences durant la campagne électorale qui l’a amené jusqu’au bureau ovale. Force est de constater que cette tactique improbable a pris tout le monde de court, avec le succès que l’on sait. Et si dès sa prise de fonction, il appliquait la même approche pour mieux détourner l’attention de ses véritables objectifs ?
En dépit d’une campagne électorale proche de l’amateurisme et d’apparentes fautes tactiques, Donald Trump a passé toutes les étapes avec succès jusqu’à la Présidence. Dès lors, on aurait pu penser, qu’une fois investi, les frasques dont il a été coutumier resteraient derrière lui.
Mais dès sa prise de fonction, bien loin de s’assagir, le milliardaire qui a fait fortune dans l’immobilier est resté égal à lui-même, sans aucune crainte de choquer, tant ses concitoyens qu’à l’étranger. Ne retenons que le «décret anti-immigration» qui a soulevé une vague unanime de condamnations de par le monde. Ce décret est-il la marque de son incompétence à occuper de si hautes fonctions, ou s’inscrit-il dans un plan dont nous n’avons pas encore perçu les contours ?
Pour répondre à cette question, il faut tout d’abord revenir sur la trajectoire unique en son genre de l’homme le plus caricaturé du monde. Pour se hisser à la tête d’un empire immobilier, puis déjouer tous les pronostics en gagnant successivement les primaires Républicaines, puis battre une Hillary Clinton rodée aux arcanes de la politique, on ne peut pas être un parfait imbécile.
Ensuite, regardons de manière factuelle «le décret infâme» qui à peine énoncé a soulevé la réprobation de tous et a été retoqué par deux fois par la justice américaine, démontrant ainsi sa vitalité. Contrairement à l’impression première, ce n’est pas une loi générale visant les ressortissants de tous les pays musulmans pendant une durée illimitée. Mais il s’agit de la suspension provisoire des visas d’entrée aux USA se limitant à sept pays, – la Syrie, l’Iran, le Yémen, la Libye, la Somalie, le Soudan et l’Irak-, en proie au terrorisme qui loin d’être des démocraties, appliquent eux-mêmes de telles dispositions. De plus, l’interdiction ne porte que sur une durée de 90 jours.
C’est prendre un bien grand risque de la part d’un président à peine élu, pour un bien maigre gain. Et si derrière ce décret maladroit, il y avait un tout autre objectif ?
En effet, si l’on analyse les pays concernés par cette interdiction, on y retrouve l’Iran chiite, alliée de la Russie, et certains de ses « pays satellites », tels la Syrie et l’Irak. Il n’y aurait qu’un tout petit pas à franchir pour discerner là un message adressé à Téhéran, à son puissant parrain, la Russie, ainsi qu’au reste du monde, afin d’étudier les réactions de part et d’autre.
Ainsi, l’admiration que porterait Donald Trump à Poutine, irait plus aux ambitions stratégiques de ce dernier qu’à l’homme lui-même. Procédant à sa manière de magnat de l’immobilier, il tenterait d’imposer à nouveau, par une sorte de raccourci, les USA comme puissance dominante. Ou comme le disait son slogan de campagne, «L’Amérique d’abord», après avoir été affaiblie, selon lui, par les deux mandats successifs d’Obama.
Vu de cette manière, qu’il gagne ou perde devant les tribunaux américains n’a aucune importance. La seule chose qui compte est que le message ait été bien compris par qui de droit. Certains testent des missiles balistiques, comme l’Iran très récemment, d’autres produisent des décrets… Et le message pourrait fort bien être le suivant : je ne suis pas fou ou incompétent. Je suis capable de tout pour la grandeur retrouvée de l’Amérique. Je n’ai pas de limites, aussi êtes-vous prêt à faire monter les enchères ?
Le triste constat est que Poutine a su imposer au reste du monde ses diktats, ne provoquant que des protestations indignées et des sanctions à la portée plus ou moins limitée. Aussi, l’attitude de Donald Trump ne devrait pas uniquement susciter la réprobation, quoique légitime, mais surtout nous interpeler quant à sa signification véritable. Car, Le Président de l’Amérique joue avec le monde, tout comme le nouveau Tsar du Kremlin, tel un toréro agitant sa cape, nous faisant oublier l’épée !