Verbatim : déclaration climat des élus locaux et régionaux de la Méditerranée

L’espace méditerranéen a été reconnu par les experts du Groupe Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (GIEC) comme une des zones des plus vulnérables en matière de changement climatique. Si rien n’est fait, ils pronostiquent à l’horizon 2100 une hausse des températures moyennes de 3 à 5°C, une diminution des précipitations pouvant atteindre 25%, une croissance de la fréquence et de l’intensité des événements climatiques extrêmes et une hausse du niveau de la mer qui pourrait atteindre 35 cm.
Le stress hydrique, la désertification, la perte de biodiversité et les inondations, les vagues de chaleur et les sécheresses, entre autres événements extrêmes auxquels la région est déjà confrontée sont autant d’indicateurs d’urgence, au moment où le dernier rapport du GIEC rappelle la nécessité d’une action d’ampleur et rapide pour limiter l’augmentation de la température moyenne en dessous de 2°C. La contribution méditerranéenne à l’atteinte de cet objectif étant cruciale, il est particulièrement important que tous les acteurs poursuivent et intensifient leur engagement.
Depuis le Sommet de la Terre de Rio (1992), les autorités locales et régionales se sont saisies progressivement de ces questions. Aujourd’hui elles sont des acteurs majeurs des politiques, des stratégies, des législations et des mécanismes de coopération sur leurs territoires respectifs. Elles se sont structurées au niveau mondial pour contribuer activement à la consécution des objectifs internationaux et nationaux, ainsi que pour formuler leurs attentes et leurs propres engagements pour le climat à travers des déclarations lors des grands rendez-vous mondiaux et notamment des dernières Conférences des Parties (COP) de la convention cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques.
Réunis à Marseille, pour apporter notre contribution méditerranéenne dans la perspective de la Conférence Paris Climat (COP 21) et dans le prolongement des déclarations passées, au premier rang desquelles celle de Nantes en 2013, nous élus locaux et régionaux méditerranéens :
-Revendiquons notre rôle primordial dans la lutte contre le réchauffement climatique. Nous
sommes, en tant que responsables du développement de nos territoires, au premier rang pour agir sur les principales causes d’émissions de gaz à effet de serre (GES) : le résidentiel (habitat et services), le transport et l’alimentation; pour élaborer des stratégies locales et régionales en matière d’adaptation aux effets du changement climatique ; pour prévenir les risques de catastrophes, préparer nos concitoyens et leur apporter une aide d’urgence.
-Rappelons que nos initiatives peuvent représenter la plus grande source de réduction des GES et de grandes potentialités d’adaptation au changement climatique, mais elles nécessitent :
-un approfondissement de la décentralisation et de la subsidiarité : plus d’autonomie, de moyens financiers et humains pour nos collectivités
-une véritable dimension territoriale de toute initiative internationale et nationale en action climat.
-Soulignons notre position privilégiée pour faire comprendre à nos concitoyens les enjeux et les impacts des négociations sur leur santé, leur sécurité, leur qualité de vie. Cette compréhension est l’une des clés pour une adhésion et une mobilisation du plus grand nombre, condition sine qua none de réussite dans un e lutte qui nous concerne tous.

Appelons les gouvernements nationaux à :
-Apporter une attention particulière à la Méditerranée : le changement climatique n’aura pas les mêmes effets sur tous les territoires. Cet espace nécessite une action spécifique et urgente, en particulier au niveau des zones côtières.
-Aboutir à la signature d’un accord ambitieux et contraignant en cohérence avec les alertes de plus en plus pressantes de la communauté scientifique ; l’urgence de la situation nécessite une réaction forte et collective, impliquant la valorisation de solutions et de savoirs faire locaux.
-Connecter l’Agenda climat à l’Agenda post 2015 pour un développement humain durable. Un lien fort doit être établi entre les différents cycles de négociations. La lutte contre le réchauffement climatique et la pauvreté, celle en faveur du développement durable et la préparation pour la résilience et la gestion des catastrophes relèvent de mêmes logiques nécessitant des stratégies d’action convergentes.
-Assurer des contributions financières aux différents fonds existants et notamment au Fonds vert pour le Climat. La participation active des pays en développement à la réduction des émissions de GES ne se fera qu’avec un appui financier conséquent.
-Approuver et encourager des mécanismes d’accès direct à ces différents fonds mondiaux pour les autorités locales et régionales. Et d’une manière plus générale que des fonds internationaux, européens et nationaux soient dédiés aux actions « climat » sur nos territoires. Nous souhaitons qu’une considération «climat » fasse partie intégrante de tous les projets financés par les partenaires au développement sur nos territoires.
-Reconnaître que l’action locale et régionale sera d’autant plus efficace si nous disposons d’outils pour mesurer, reporter et vérifier les émissions de GES dans une démarche transparente impliquant nos citoyens.

Nous nous engageons à:
-Mobiliser le plus grand nombre d’autorités locales et régionales du bassin méditerranéen à s’engager dans une approche plus inclusive vers la construction d’un prochain accord international ambitieux et contraignant en cohérence avec les alertes de plus en plus pressantes de la communauté scientifique.
-Mobiliser davantage sur nos territoires en étant les initiateurs, ensembliers et coordinateurs de projets et d’initiatives politiques d’atténuation et d’adaptation au changement climatique
-Intensifier, à la hauteur de nos moyens, notre participation dans les processus globaux sur le changement climatique, à l’image du Carbon Climate Registry, Making Cities Resilient ou encore la Convention des Maires.
-Mobiliser, lorsque cela nous est possible, des financements locaux et régionaux pour la mise en œuvre de plans d’actions et de stratégies en faveur de la réduction des émissions de GES, de l’émergence de solutions énergétiques plus durables et de l’adaptation au changement climatique dans la continuité du Pacte de Mexico (2010). Ces plans et stratégies sont des opportunités de création de richesses et d’emplois.

Parmi les multiples possibilités d’actions, nous nous engageons à concentrer les nôtres sur des axes pour lesquels nous sommes susceptibles d’obtenir un effet de levier important au regard du profil de nos territoires:
-le développement de stratégies de développement territorial intégré et urbain durable axées sur la lutte contre l’étalement mais également sur une gestion durable des transports ;
-le développement de politiques d’efficacité énergétique et de stratégies régionales coordonnées pour la rénovation énergétique de bâtiments à l’échelle du bassin ;
-le développement d’énergies renouvelables, avec une attention particulière pour le solaire, la biomasse et le secteur émergent des énergies marines ;
-le développement d’éco-quartiers, de corridors verts/bleus, d’espaces publics ;
-la structuration de filières de gestion des déchets et leur valorisation ;
-le développement de stratégies de gestion intégrée des zones côtières ;
-le développement de stratégies de réduction des risques liés aux désastres et d’accroissement de la résilience;
-l’amélioration de la gestion durable des ressources hydriques (qualité, dépuration, utilisation, disposition, distribution, prix, technologies et techniques innovantes, traditionnelles) ;
-le renforcement des politiques locales de communication/information du citoyen sur tous ces sujets.
Enfin, nous proposons:
-De répertorier au sein de la Commission Méditerranée de CGLU et de la CIM de la CRPM des bonnes pratiques déclinables sur les territoires méditerranéens. Cet état des lieux pourra permettre l’intensification des échanges d’expérience et la capitalisation de ses résultats au travers, notamment, des coopérations, le renforcement des capacités et l’adaptation des dispositifs existants aux spécificités locales et régionales.
-De développer et soutenir de nouvelles actions liées aux politiques euro-méditerranéennes
notamment en matière d’énergie, climat, industries, maritimes, voisinage parmi d’autres
concernées.
-D’étudier la possibilité de mettre en place un fonds de solidarité de type fonds vert sur le climat en Méditerranée.
-De suivre nos engagements et de mesurer les avancées lors du prochain Forum des Autorités Locales et Régionales de la Méditerranée en 2016.

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