On pensait la chose impossible et pourtant c’est fait. Les Appellations d’Origine Protégée (AOP) de Provence : Côtes de Provence, Coteaux d’Aix-en-Provence, Coteaux Varois-en-Provence, Bandol, Cassis, Palette, Baux-de-Provence et Bellet ont décidé de s’unir au sein d’une structure fédérative dans le but de « renforcer la valorisation et le développement économique de leurs vins ». La naissance de cette Fédération a été officialisée le 4 mars.
L’union fait la force, c’est bien connu. Mais en matière viticole, pendant longtemps, cela n’a pas été le cas du côté des appellations régionales. Les « grands » rechignaient à partager le vocable “Provence” et les « petits » étaient plus qu’hésitants ayant peur de se faire « manger » par les « grands ». Bon an, mal an, les Organismes de Défense et de Gestion (ODG) des différentes appellations menaient leur barque chacun pour soi et Dieu pour tous et tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles puisque les cours étaient performants et les marchés actifs.
On peut penser que la crise et la conjoncture ne sont pas étrangères au fait que le discours de certains qui prônaient l’union sous la bannière « Provence » ait été entendu et qu’une étape réellement historique ait été franchie avec la création de la « Fédération des AOP » il y a quelques jours. Cette dernière est structurée en quatre pôles de compétences auxquels les membres peuvent choisir d’adhérer individuellement selon leurs préférences, la seul compétence « Affaires Publiques » étant commune à tous.
Les pôles de compétences sont ainsi définis :
– Défense et accompagnement juridique : l’ODG Côtes de Provence mène depuis 10 ans, une politique de protection du nom de son appellation dans le monde pour empêcher le détournement de notoriété, la contrefaçon et la pratique commerciale trompeuse. Les ODG Coteaux d’Aix-en-Provence et Coteaux Varois en Provence s’associent dorénavant à cette impulsion.
– Technique : l’objectif est la coordination et la mise en œuvre du Plan Climat pour faciliter l’adaptation du vignoble au réchauffement climatique.
– Affaires publiques : l’objectif est d’être force de proposition sur les sujets viticoles et les orientations nationales et européennes qui impacteront demain la filière.
– Dématérialisation et gestion de plateforme: la finalité est de mettre en place une plateforme unique où toutes les déclarations des cahiers des charges pourront être réalisées directement en ligne.
Eric Pastorino président
Chaque ODG conservera la gestion autonome de son cahier des charges et de son plan de contrôle. Par ailleurs, chaque appellation développera ses propres actions de communication, à l’exception des Côtes de Provence, Coteaux d’Aix-en-Provence et Coteaux Varois-en-Provence dont la communication est assurée par le CIVP, structure interprofessionnelle. « Cette fédération est une première étape d’une union générale derrière la bannière Provence pour laquelle je me bat depuis des années, nous confiait Olivier Nasles, le président des Coteaux d’Aix-en-Provence. Elle commence à réparer les erreurs du passé et d’autres avancées collectives verront le jour dans les années qui arrivent.» Dans le prolongement de sa présidence à l’ODG Côtes de Provence, Eric Pastorino a été désigné Président de la Fédération. «Il est important de s’unir face aux enjeux de demain, de réfléchir collectivement à l’avenir de nos AOP et de mutualiser nos moyens, explique-t-il. Plus que jamais le collectif sera la clé de réussite de nos vignobles ».
Même discours chez Cédric Gravier, le président de l’ODG Bandol : «Cette Fédération est un outil important pour aborder l’avenir car ses préoccupations se concentreront sur notre territoire provençal. Dans le contexte actuel il serait stupide de faire bande à part; aujourd’hui, avec cette structure, la Provence et ses vins sont en mesure de se faire entendre plus efficacement tant au niveau national qu’européen. » A l’heure d’affronter la crise qui pourrait s’accentuer avec l’augmentation des taxes sur les produits européens dont menace Donald Trump, cette fédération des AOP consacre une première union historique significative; en attendant d’autres réalisations communes.
Michel EGEA