Publié le 19 janvier 2019 à 9h45 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 13h46
«Je ne m’interdis rien. Lorsque je vois la montée des populismes, je ne laisserai jamais Marseille tomber entre de telles mains et je ferai tout pour que ce territoire réussisse», répond Martine Vassal, à une question relative à sa candidature aux municipales à Marseille. Candidature que Bruno Gilles, LR a déjà présenté, elle juge à ce propos: «Sa démarche participative est intéressante. Mais il ne faut pas pour autant mettre la charrue avant les bœufs, construisons un projet et on verra qui sera le meilleur pour le porter». Et lorsqu’on lui demande sa réflexion en termes d’alliances politiques, elle assène:«qui m’aime me suive». Des vœux lors desquels elle exprimera son inquiétude sur le plan international, le mouvement des gilets jaunes, la fusion métropole-parlement, le drame de la rue d’Aubagne. Concernant le Partenariat public-privé (PPP) pour la réhabilitation de 14 écoles elle signale ne pas avoir voté ce dossier et avance: «Il faut étudier ce dossier, s’il est bénéfique pour les Marseillais, très bien, mais si la sauce est plus chère que le poisson…». Précisant immédiatement: «Il faut bien voir que si Marseille est dans cet état c’est parce que l’État et les collectivités territoriales n’ont pas considéré la Ville comme il le fallait».
Martine Vassal présidente LR du département des Bouches-du-Rhône et de la métropole Aix-Marseille-Provence avait fait le choix d’un lieu hautement symbolique pour présenter ses vœux à la presse: la Fondation du Camp des Milles. Dans ce bâtiment furent internées entre 1939 et 1942, plus de 10 000 personnes dans des conditions de plus en plus dures. Réfugiée en France, la plupart fuyait le totalitarisme, le fanatisme et les persécutions en Europe. L’histoire du Camp des Milles témoigne de l’engrenage des intolérances successives, xénophobe, idéologique et antisémite qui conduisit à la déportation de plus de 2 000 hommes, femmes et enfants juifs depuis le Camp des Milles vers le Camp d’extermination d’Auschwitz, via Drancy et Rivesaltes. Il met aussi en avant le fait que, face au racisme, à la lâcheté et à l’indifférence, des résistants aux Milles comme ailleurs sauvèrent l’honneur de la France et de l’humanité. «J’ai choisi d’organiser cette manifestation au camp des Milles, parce que j’y vois un sens politique profond», explique Martine Vassal qui rappelle que «le monde est perturbé par des phénomènes qui bousculent l’ordre établi : le dérèglement climatique, la montée de l’intégrisme islamique, conduisent des personnes à fuir leur pays. La nouvelle politique américaine inspirée par Trump nous fait trembler».
«L’Europe est plus divisée que jamais sur son présent et sur son avenir»
Le portrait reste tout aussi sombre lorsqu’elle ajoute: «L’Europe et la France vivent des heures graves et même sombres. L’Europe est plus divisée que jamais sur son présent et sur son avenir. Une Europe incapable de gérer le Brexit, de juguler les flux migratoires et de réformer ses institutions et on parle même maintenant de Drexit pour l’Allemagne. Il est urgent se se rappeler pourquoi l’Europe a été créée, pour être un espace de paix, paix dans laquelle nous vivons depuis 70 ans». Quant à La France, elle traverse, considère Martine Vassal «une crise économique, sociale et politique d’un niveau jamais atteint depuis 1968. Le fameux « modèle français » est à bout de souffle, épuisé par des décennies d’immobilisme et d’incantations. La démocratie représentative ne répond plus à son objectif premier, celui de représenter les Français. Dans ce contexte tourmenté, la tentation du populisme est de plus en plus grande. Certains l’ont fait aux États-Unis, en Italie, au Brésil, en Autriche. La situation est extrêmement grave. Les périodes où l’effondrement économique et social s’accompagne de la violence et de l’extrémisme sont dangereuses pour nos peuples». Puis d’affirmer qu’il n’est pas trop tard. «Il n’y a pas de fatalité à abandonner la voie de la raison et de la modération. Ne nous laissons pas entraîner dans le chaos ou l’insurrection». Avant de dénoncer: «J’ai été particulièrement choquée par les agressions et les violences dont certains journalistes ont été les victimes. Personne n’a le droit de s’en prendre à des journalistes qui font leur métier, celui de couvrir les événements et de rendre compte».
«Le 28 février débutera l’expérimentation du permis de louer»
Concernant les événements locaux et, en premier lieu, la tragédie de la rue d’Aubagne, elle déclare: «J’ai pris le temps de la réflexion pour assumer mes responsabilités. J’ai annoncé un plan le 28 novembre dernier et le ministre du logement sera présent les 21 et 22 janvier pour signer un certain nombre de conventions. Nous ouvrirons un espace d’accompagnement à l’habitat. Ce même jour, nous lancerons les Assises du logement et, le 28 février débutera l’expérimentation du permis de louer». Elle déplore cependant: «Nous avons des difficultés à obtenir des réponses des propriétaires privés pour réhabiliter les immeubles». Elle en vient aux transports pour annoncer: «J’ai toujours été favorable au Val’Tram. Il y a juste eu un problème de budget. Un temps annoncé à hauteur de 130M€, insoutenable, il est revenu à 100M€, nous investirons 30 millions dans ce dossier et la métropole a acquis les terrains des deux côtés de la voie». Elle ne cache pas son dépit de voir que l’État n’a toujours pas versé les fonds qu’il s’était engagé à verser en matière de mobilité. Concernant la fusion métropole-département elle annonce que le scrutin municipal de 2020 se déroulera dans les mêmes conditions que le précédent, avec des élus fléchés pour la métropole mais il n’y aura plus d’élus territoriaux. Et, elle propose que l’actuel siège du Département devienne celui de la métropole. Concernant les jeunes migrants non accompagnés elle souhaite qu’«une politique française et européenne gèrent ses flux». Insiste sur toute l’importance qu’elle accorde à cette question mais, précise-t-elle: «Il faut savoir que lorsque je suis arrivée à la tête du Département nous avions une soixantaine de jeunes, nous en avons aujourd’hui 804. Nous avons développé le nombre de places de façon conséquente et nous allons ouvrir une centaine de places supplémentaires». Elle indique enfin être favorable au Grand débat national tout en comprenant que des maires soient réticents: «Le gouvernement les a ignorés pendant 18 mois et maintenant il vient leur dire qu’ils doivent mettre en place des cahiers de doléances… Au-delà de cela je souhaite que ce débat serve à quelque chose car si rien ne changeait après ce serait tragique.» Au préalable, Alain Chouraqui, le Président de la Fondation du Camp des Milles – Mémoire et Éducation considérait: «Nous sommes à un moment où la presse est critiquée, violentée. Nous sommes dans un moment grave où l’Histoire hésite, peut basculer vers le pire et ce n’est pas un hasard si les journalistes font l’objet de rejet. Ils sont les points sensibles sur lesquels apparaissent les symptômes d’un mal profond.»
Michel CAIRE